Quelle horrible peine que d'être, sans pouvoir s'en satisfaire.

L'obscurité n'est qu'un leurre, au-delà de la nuit, par-dessus l'horizon, elle feint de nous aveugler, cette toile si propice à l'introspection. On y discerne plus clairement qu'en plein jour le tréfonds de notre âme. L'obscurité, est une chandelle à nos réflexions.
Mes doutes sur l'avenir prennent forme en sa compagnie. Pas sur celui de l'homme, qui m'indiffère, mais sur le mien, qui m'indispose. Je visite par sa compagnie l'encombrement de mes pensées, l'incertitude et la crainte qui m'empoignent.
Ne sachant trop quoi attendre du futur, je me laisse séduire par cette constatation : la conscience que possède l'homme à pour seule et unique qualité celle de lui infliger le doute quant à la condition de son existence.
Ne sachant pourquoi il est en mesure se poser une question à laquelle il n'est de réponse, la conscience torture l'homme qui cherche le pourquoi de sa présence.
C'est être emporté par les eaux, emprisonné du courant que de vivre ; on ne saisi rien de l'étendu du fleuve qui nous transporte. On discerne simplement le sens de sa coulée, les endroits que l'on a dépassé. Mais jamais l'on ne saisit ce vers quoi on tend, si tenté que l'on tende à quelque chose.
Je me fatigue à l'idée de penser mon devenir, devenant la proie du doute entre deux certitudes, mon esprit vagabonde sans trouver où s'arrêter ou se réfugier.
Je me remets aux enseignements qui m'ont été délivrés ; comprendre le passé pour mieux entrevoir l'avenir, saisir les erreurs et les choses qui ne changerons pas, de manière à anticiper les revers et les fortunes.
Par cette modique connaissance que j'ai de moi-même, je présume qu'à l'avenir, je serais tout aussi tributaire qu'aujourd'hui du retard, je ne bâtirais ce que j'entreprends qu'au prix d'années d'acharnement. Peut-être mourrais-je ; peut-être deviendrais-je fou, en grande partie pour ne pas avoir à savoir si je suis capable d'être ce que j'ambitionne d'être, ma façon à moi de ne pas risquer le destin, de ne pas subir l'anéantissement de la défaite ; peut-être réussirais-je, peut-être pas aussi bien que voulu, mais j'attacherais bien du mérite à cette réussite, d'autant plus que je l'aurais senti en moi toutes ces années, elle sera ma confirmation.
A bien y songer je ne sais rien, et c'est bien cela le plus dur : se résoudre à son ignorance.