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Au détour d'un virage par Angie

Au détour d'un virage

Je n’ai jamais été une fleur de nuit. Le noir n’était pas mon élément favori. Et, la vie aidant, je m’y suis faite. Rouler la nuit, à la lueur de la lune qui perce le ciel noir, sur des routes de montagnes, procure une sensation de liberté. On file vers les sommets, on se laisse porter. Il y a ce quelque chose qui nous apporte une sorte de bien être.

 

Une nuit, au volant de ma voiture, je remontais la route d’un col pour rentrer chez moi. La lune éclairait mon chemin. La route était belle. J’allais confiante vers mon destin. Par-ci, par-là, le brouillard commença à envahir l’atmosphère. Une idée traversa mon esprit. Cette ambiance aurait fait un bon décor pour un film surnaturel. Je ris à cette pensée. Je ne savais pas que les derniers mètres qui me séparaient de mon village allaient m’apporter une chose à laquelle je ne pensais pas assister un jour…

 

Au détour d’un virage, une ombre m’interpella. Je jetais un coup d’œil dans mon rétroviseur, rien. Mon imagination me jouait des tours ! Je repris mes esprits, le cœur battant. La sérénité qui était mienne quelques mètres auparavant n’était plus là. Elle avait laissé place à une boule d’angoisse grandissante, envahissante.

La route me semblait interminable. Je me rendis compte qu’elle n’en finissait pas. Les virages se succédaient, sortant de nul part. Ce n’était pas ma route, celle que j’empruntais tous les jours. D’où sortaient ces virages, ces parapets sans barrière ? Et la lune, où était la lune ? L’angoisse augmentait. La peur me gagnait, une peur incontrôlable, car je ne savais pas de quoi j’avais peur !

D’un coup, je sentis une présence dans l’habitacle de la voiture. Mon regard se porta sur ma droite, le temps d’une fraction de secondes, pour ne pas perdre la route des yeux trop longtemps, cette route étrange, sortie de nulle part.

-         Ah !

Deux yeux brillaient à côté de moi ! Deux petites billes luisantes me fixaient. J’eus l’impression que mon cœur allait sortir hors de ma poitrine !

Je mis un coup de volant brutal vers la gauche. La voiture partie en toupie. Je ne contrôlais plus rien. Je fermais les yeux.

 

Je ne réussissais pas à me décider à les rouvrir. La voiture avait stoppé sa ronde folle. Le moteur tournait. Je n’avais rien touché. Comment ? Aucune idée, mais je n’avais ressenti aucun choc. Tout s’était simplement arrêté d’un coup. Je tentais par tous les moyens de me calmer. Je respirais lentement. Je me répétais que tout allait bien, que j’allais reprendre ma route et que dans quelques minutes, je serais dans mon lit.

Au prix de tous ces efforts, je réussis à lever les paupières. Tout était fait de noir autour de moi. Je regardais fixement mon pare brise. Doucement, millimètres, par millimètre, je tournais la tête à droite. Rien. Il n’y avait plus rien. D’un coup, je me sentis plus légère.

-         Tu perds la tête ma pauvre ! Allez, passe la première, on rentre !

La vitesse passée, je regardais dans mon rétroviseur intérieur.

-         Non !

Les deux billes luisantes étaient sur la plage arrière. Elles me regardaient fixement. Ma légèreté s’était évanouie. La peur était à nouveau là.

-         Je dois me retourner pour en avoir le cœur net ! Allez, courage !

 

Je fis un demi-tour sur moi-même, d’un coup, pour être certaine de ne pas changer d’avis en cours de route.

-         C’est pas possible !

Je ne rêvais pas. Il y avait quelqu’un, ou plutôt quelque chose. Malgré la peur, je décidais d’allumer les lumières intérieures de la voiture. Il fallait que je sache ce qui se promenait avec moi. Quelle créature s’était invitée ? Quelle genre d’histoire je vivais ?

Mes pensées s’embrouillaient. Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait. Tout cela me semblait impossible, irréel. Et cette nuit, si claire et accueillante qui s’était transformée en une nuit noire et effrayante, en l’espace d’une seconde. Comment cela pouvait être possible ?

 

La lumière blanche au dessus de moi m’éblouit. La curiosité devint tout  à coup bien plus forte que la peur. Calmement, je me retournais. Un léger rire me gagna.

-         Mais que fais-tu là toi ? D’où sors-tu ?

Un petit chien blanc était couché sur la plage arrière et me regardait. Il ne bougeait pas. J’avais beau lui parler, il restait immobile.

J’avais eu peur d’un petit chien, une petite boule de poils blanche. Je me sentais quelque peu ridicule.

Oui, mais, d’où sort-il ce chien ? Comment est-il arrivé dans ma voiture ? Quand je l’ai reprise tout à l’heure, aucun chien ne me suivait, aucun chien n’aurait pu entrer sans que je m’en aperçoive.

Ce chien qui n’avait cessé de me fixer était bien étrange. Je n’osais m’approcher de lui. Je n’osais même plus lui parler.

Je me rendis compte d’un coup que j’étais toujours au milieu de la route. Il me fallait bouger. Il me fallait rentrer chez moi. Je verrais bien une fois arrivée ce que je ferais de ce chien.

 

Les alentours étaient si calme, si paisible. Je ne savais pas où je me trouvais. Ces lieux m’étaient inconnus. Et pourtant, cette route, je la connaissais par cœur. De quel côté repartir ? J’étais perdue.

La nuit avait, à nouveau, envahi l’habitacle de la voiture. Je n’aime pas conduire avec une lumière, je préfère la pénombre naturelle du moment.

Je choisis une direction, au hasard, je verrais bien où cette route me mènerait. Un virage, puis deux, toujours pas de signe familier. J’allais, suivant la route, me laissant porter par mon instinct. Subitement, dans la lueur de mes phares, le petit chien apparut ! Je freinais brusquement ! Je ne savais plus quoi faire. Je ne voyais que son regard perçant. Je fermais les yeux.

 

J’attendais un choc. Il arriva. Un énorme sursaut ! J’ouvrais les yeux, le cœur battant. J’étais dans mon lit…

La nuit était claire au dehors, elle semblait paisible.

J’avais fait un rêve, juste un rêve. Cela était certainement dû à cette histoire que l’on m’avait racontée la veille. Cette petite chienne blanche qui apparaissait aux voyageurs égarés dans la vallée. L’imaginaire et le subconscient savent bien nous jouer des tours.

 

J’aime rouler la nuit. J’aime sentir cette liberté qu’elle nous offre et j’attends toujours de croiser sur mon chemin, une petite chienne blanche, au détour d’un virage…

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Style : Nouvelle | Par Angie | Voir tous ses textes | Visite : 734

Coup de cœur : 8 / Technique : 8

Commentaires :

pseudo : ifrit

Je vois cette petite chienne blanche comme une invitation à changer de route. Tu l'as bien dit, le noir n'est pas ton élément favori, alors pourquoi ne pas emprunter le blanc ? Écris-nous la suite si tu en rêves, s'il te plaît !