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Le soleil se coucha, et puis ce fut le soir.

Dans ma chambre, tout seul devant le grand miroir,

Je regarde éperdu mon infâme visage,

Mon visage blafard, mon visage sans âge.

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Est-ce ma faute à moi si j'ai la tête immonde ?

Et puis si dans mon dos j'ai une bosse ronde ?

Alors, disent certains, on me prend pour un monstre.

Pourquoi leur donner tort lorsque le soir je montre

A tous ces gens heureux mon visage difforme,

Et puis je leur fais peur avec mon corps informe.

                              *

Devant tous ces idiots je montre mon hideur,

Sans cacher un repli de toute cette horreur.

Mais s'ils savaient, pourtant, que j'ai vu hier au soir

Quelques milliers de feux qui brillaient dans le noir.

                             *

Des étoiles de sang, tel un vil maléfice,

Eclataient devant moi comme un feu d'artifice.

Et puis ce fut le noir, les ténèbres, la nuit.

Quand, soudain, sur ma tête un éclair a reluit.

                              *

Le Diable est apparu une fourche à la main.

Alors il m'a parlé; il m'a dit que demain

Je serai le plus beau, je serai le plus fort,

Et je serai celui qui domine la Mort.

Mais il m'a dit aussi : "Tu es parmi les dieux,

"Tu seras au-dessus de la Terre et des cieux !

"Prends une grande épée, et crève cette Terre

"Car ce n'est qu'un ballon gonflé par la misère."

                              *

Voilà ce que m'a dit mon maître diabolique.

Et demain, pour longtemps, je serai magnifique.

Alors je serai beau, je serai dans les cieux

Lorsque ce vil ballon crèvera sous mes yeux.

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Puis le jour se leva, avec lui le soleil,

Et devant le miroir mon visage est pareil,

Pareil à ce qu'a dit mon maître satanique.

Je suis beau ! Je suis fort ! Mon corps est athlétique !

                              *

Mais, que m'arrive-t-il ? Qu'est-ce que je raconte ?

Mais ce n'est pas réel ! Tout ça n'était qu'un conte !

J'ai toujours été beau ! Quel cauchemar minable !

Satan et ses éclairs peuvent aller au diable !

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                                   rémige,  1971