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Jour n°1 par Lucinda

Jour n°1

Un matin grisâtre, rien de bon en perspective. Comme tous les matins, l'envie de me lever n'est pas là. Heureusement que ma journée commence par la promenade de notre boule de poil. Même si elle tire un peu le matin, elle est toujours contente de me voir au moins, c'est déjà ça.

Je n'ai pas très bien dormi, mais ceci dit, ce n'est pas nouveau depuis quelques temps. C'est ce qui arrive quand je rentre dans cet état désagréable qui vous donne la nausée dès votre réveil. Bien au-delà de mon problème quotidien qui consiste à aller dans ma twingo musicale à un travail qui m'ennuie de plus en plus chaque jour, j'ai ce problème classique et persistant des relations humaines.

Ma promenade me plonge dans mes réflexions. Je me souviens de la veille. Au bord des larmes, une discussion bien agréable, une autre un peu plus vive, mais tout aussi bénéfique. Je le ramène, comme souvent. Il tente de me remonter le moral. Il ne sait bien sûr pas tout ce que j'ai vécu, ni pourquoi je suis ce que je suis (et il vaut sans doute mieux). Mais il est là. Malgré le mal que je lui ai déjà fait, il reste. Serait-ce une caractéristique des gens biens ? Ou des gens qui m'apprécient ? Encore une énigme humaine qui est bien trop grande pour moi.

Je me laisse tenter par un thé chez lui. Après tout, je n'ai pas le moral, et si je rentre ainsi, je risque de ne pas réussir à surmonter ma tristesse. Moment agréable, et réconfortant, mais pourtant teinté de cette douleur interne.


Les oiseaux chantent, les écureuils courent d'arbre en arbre, la boule de poil tire de plus belle, mais se ravise bien vite. Pourquoi le souvenir d'un moment sympathique reste teinté d'une si grande tristesse intérieure ?

Je rentre, déjeune. Son sourire me met de bonne humeur. J'ai bien de la chance de l'avoir auprès de moi. Et il est bien patient de me supporter chaque jour. Il sait ce que j'en pense, alors je savoure en silence.

Il part, je traîne un peu à la maison. L'envie d'aller m'enfermer dans cette prison quotidienne est devenue une crainte, une peur, presque une phobie. Je me couche le soir en y pensant, je me lève en détestant par avance la journée qui va s'écouler. Quand je pense que certains estiment que c'est une chance de ne rien avoir à faire au travail. Evidemment, ils ne savent pas encore ce que c'est, je ne peux leur en vouloir.

Ma voiture m'emmène, accompagnée de Rose. Petit moment de réconfort.


Mais je repense à tout ça. Je repense à hier, à lui, à lui aussi et encore à lui. Trois personnes que j'ai déçues, blessées ou maltraitées. Trois personnes qui encore une fois ont eu à croiser ma vie.

Durant ma dégustation de thé la veille, cet ami a tenté de m'expliquer que savoir s'entretenir avec ceux de son espèce est une chose qui s'apprend, que cela peut être très long, et que je ne dois pas m'en vouloir. Pour lui, le fait que je me rende compte d'un souci est déjà beaucoup. Certains ont le déclic social vers 45 ans. Et si je ne l'avais jamais ? Je dois donc voir tous les gens auxquels je tiens partir loin de moins sans cesse ? Toujours par ma faute ? J'ai beau ne pas apprécier, je ne sais pas vraiment comment me comporter pour changer ça.

Il nous manque ce genre d'éducation à l'école. Les cours de communication ne m'ont servi à rien, mis à part savoir que je m'exprime parfaitement quand je sais de quoi je parle, et de briller en prépa au moins dans une matière (et c'était bien la seule). Ils auraient dû mettre des cours de relations sociales. Le genre de cours faits de petits exercices quotidiens, d'études sur les relations humaines. Le genre de cours qui m'auraient permise d'être plus apte socialement parlant.

En attendant, je dois faire avec ce que je sais. Je sais expliquer les phénomènes sociaux, mais pas y réagir comme il se doit. Je sais expliquer pourquoi il se passe telle ou telle chose, mais pas conserver l'existant.

L'analyse et la pratique sont tellement différentes.

 

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Coup de cœur : 16 / Technique : 8

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