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DELIRIUM TREMENS par hoogewys patrick

DELIRIUM TREMENS

Delirium Tremens

     C'était un soir de réveillon de nöel à une époque ou ma vie sentimentale était aussi plate que l'électrocardiogramme d'un trépassé. J'étais un jeune architecte promis à un avenir brillant et je n'avait pas l'intention de me lancer dans une aventure sentimentale qui m'eut détourné de mes objectifs professionnels. A quelques centaines de mètres de mon domicile une table avait été réservée par ma secrétaire dans un restaurant à la mode depuis que le patron était sorti avec une jeune starlette montante du cinéma. Outre la starlette les prix du restaurant avaient eux aussi subit une courbe ascendante, mais au diable les considérations matérielles ce réveillon devait être grandiose et il le fut.

     J'avais commencé les libations de bonne heure je dirais vers dix huit heure, au bar une bouteille de dom Pérignon me tenant lieu de compagne éphémère et je dirais plus qu'éphémère. Deux heures plus tard et une troisième bouteille vidée, je me retrouvais avec quelques nouveaux amis inconnus avant mon arrivée au restaurant et perdus de vue des que je l'aurais quitté. J'allais ensuite en salle ou je commandais un copieux repas que j'arrosais abondamment de vins recommandés par le sommelier. Après la bûche traditionnelle, le café et le pousse qui le suit je fumais un énorme havane de chez monsieur Davidoff.

     Je quittais le restaurant vers deux heures du matin dans un état d'ébriété avancé. Je le quittais comme j'y étais venu, seul. Ce n'était pas encore ce soir que le petit jésus allait trouver une crèche de toute façon dans l'état ou je me trouvais il aurait été incapable de dire bonjour à la dame.

     Je rentrais tant bien que mal à mon domicile non sans avoir au passage marqué mon territoire sur quelques murs et réverbères. Incapable de me dévêtir je m'écroulais sur le canapé du salon et sombrais dans un semi coma éthylique, lorsque j'entendis au pied de ma cheminée le bruit d'une chute suivie d'un chapelet de jurons biens sentis, j'ouvrais les yeux et comme je n'avais pas éteint la lumière je vis assis sur son postérieur dans l'âtre de la cheminée un type habillé de rouge quand son vêtement devait être propre mais qui me faisait plutôt penser à un ramoneur, couvert de suie qu'il était. Lui aussi me vit et sans se démonter le moins du monde commença à m'invectiver, me reprochant la saleté de ma cheminée, les notes de frais que le nettoyage à sec allait lui coûter, il m'abrutissait de paroles et je restais la comme un idiot.

     Lorsqu'il eu fini sa diatribe je lui demandais qui il était. Il me répondit sur un air indigné.

- Ai-je l'air du petit chaperon rouge

-Non pas vraiment

-Alors vous en déduisez ?

-Que je vende mon âme au diable et que je sois pendu si vous n'êtes pas une hallucination éthylique!

-Pour ce qui est de vôtre âme c'est déjà fait, avec qui croyez vous avoir bu au restaurant? Et pour ce qui est d'être pendu ne vous inquiétez pas cela viendra assez tôt

-Comment savez vous que j'étais au restaurant?

-Tout simplement parce que j'y étais, vous ne vous rappelez plus? Il est vrai que je ne portais pas encore ma tenue de travail, avec mon ami le cornu vous nous avez bien régalés.

-Je dois devenir fou et je parle tout seul.

-Pas du tout.

Que voulez vous

-Vous apporter des cadeaux pour Noël!

-Vous vous foutez de moi?

-Que nenni

-Vous voulez me faire croire que vous êtes le père noël?

-Non bien sur simplement un de ses assistants et cette année c'est vous Monsieur richard qui avez été tiré au sort pour recevoir le cadeau rêvé

-Et que pouvez vous m'offrir

-Tout

     Je ne savais que répondre, il me semblait que le peu de raison qui me restait partait en lambeaux. Je décidais de jouer le jeu de mon phantasme, au pire je me réveillerais au matin avec un affreux mal de crane.

-J'aimerais une mine d'or

-Pas de problème mais avant de vous livrer le cadeau, je dois vous le montrer dans le détail avec les conséquences que celui ci aura sur votre vie

     je me vis alors à l'entrée d'un tunnel vêtu d'un costume de mineur, un casque muni d'une lampe frontale sur la tête et une pioche à la main, pénétrant dans ce tunnel  j'en ressortais poussant un chariot rempli du précieux minerai. Ma fortune était considérable et au bout de quelques jours j'avais embauché une cinquantaine de mineurs. Le temps s'écoula ainsi devant mes yeux, je jouais des fortunes en bourse, achetant des chaînes d'hôtels, des yachts, graissant la patte de quelques hommes politiques de tout poil afin de faciliter mes affaires, tout allait pour le mieux puis le temps s'écoula encore et arriva la catastrophe. Le crac boursier fut aussi violent qu'inattendu, des fortunes partirent en fumée en une seule nuit dont la mienne, c'est une période ou il y eu beaucoup de suicides.

     Il me restait ma mine mais le gisement commençait à s'appauvrir dangereusement. Il fallais que je trouve une solution. La plus judicieuse qui me vint à l'esprit fut l'escroquerie à l'assurance, en faisant dynamiter la mine avec les ouvriers à l'intérieur je faisais d'une pierre deux coups.

Premièrement cela m'évitait des licenciement coûteux

Deuxièmement encaissement de la prime qui naturellement était surévaluée par rapport à la valeur réelle de la perte.

       Je fis un nouveau bond dans le temps, j'étais couché quand mon majordome vint me prévenir que deux personnes de la police désiraient me voir au salon. Je m'habillais en hâte et rejoignais les deux policiers qui me passèrent les bracelets avant que j'ai eu le temps de dire quoi que ce soit puis tout se déroula très vite, les interrogatoires, le procès, la condamnation à mort.

     La corde m'enserrait le cou puis je sentis la trappe se dérober sous mes pieds, mon cœur fit un bond dans ma poitrine au moment de la chute. Je hurlais a l'instant ou ma nuque se rompit. J'étais dans mon salon une sueur froide et nauséabonde coulait sous mes aisselles, je puais la peur.

Le sois disant assistant du père noël était devant moi tout sourire

-Alors votre cadeau vous plait?

-Pas du tout vous pouvez le garder

-Que désirez vous à la place

-Je ne sais pas

-Je peux vous proposer une dictature dans un pays d'Amérique centrale

     Avant que j'ai eu le temps de lui répondre j'étais à la tête d'une armée de gueux en guenilles n'ayant pour toutes armes que des outils agricoles. Il y en avait des milliers et nous prenions d'assaut le palais présidentiel ou le président à vie auto proclamé, un ancien général de l'armée de l'air s'était retranché avec son état major. L'armée pris le parti de ne pas prendre parti et nous laissa entrer sans encombre dans le palais. A l'intérieur nous exécutâmes tous ceux qui firent mine de nous résister et pour faire bonne mesure ceux qui se rendaient spontanément si bien qu'en moins d'une heure nous nous étions rendus maîtres de la place. Quant au général il fut suicidé par la fenêtre de son bureau au cinquième étage. La dictature que je venais de renverser était atroce, la mienne fut pire. Enlèvement d'opposants, torture détentions arbitraires, meurtres toute la panoplie y passa sans oublier la spoliation des biens de mes victimes.

     Le peuple qui m'avais servi de tremplin pour la prise du pouvoir ne fut pas oublié. Avec l'ancien régime il était assommé d'impôts et taxes en tout genre, je le réduisit à la famine. Les années passèrent ou je tenais le pays d'une main de fer, ma fortune était aussi considérable que la misère dans laquelle se trouvait le peuple, les caisse de l'état étaient vides, la production industrielle à l'agonie et des milliers de mendiants erraient dans les rues. De temps en temps ils s'approchaient du palais pour manifester leur colère et réclamer du pain et du travail mais quelques salves de ma garde prétorienne avait tôt fait d'en coucher des dizaines sur le pavé, les autres fuyant pour ne pas subir le même sort.

     Ma garde fut fidèle jusqu'au jour ou je leur refusais d'augmenter leur solde, décision funeste. Quelques jours plus tard le peuple envahissait mon palais, m'accrochait une corde au cou et me jetai par la même fenêtre que mon prédécesseur, seule différence je n'atteignis pas le sol ma nuque fut brisée par le nœud coulant de la corde entre le troisième et le deuxième étage.

     Je me retrouvais une nouvelle fois dans mon salon

-Alors ce cadeau ci vous plait il

-Non gardez vos cadeaux, sortez de chez moi, je veux être seul.

-Ne faites pas l'enfant, laissez moi réfléchir ! L'amour voilà ce qu'il vous faut.

      Aussitôt je me retrouvais dans le restaurant ou j'avais passé le réveillon. J'étais remonté dans le temps à l'instant ou je commandais ma première bouteille de champagne. Une jeune femme d'une trentaine d'années se tenait au bar à quelques mètres de moi, elle avait les cheveux d'un noir profond, un visage fin et très long et des yeux aussi noirs que ses cheveux, elle  me fit penser à une madone. Elle avait l'air pensive et cela ne la rendait que plus belle. Lorsqu'elle vit que je la regardais elle me sourit, je lui proposait une coupe de champagne qu'elle accepta. Nous discutâmes ainsi durant toute la soirée, je m'étais permis de l'inviter à partager mon repas de réveillon ce qu'elle accepta aussi. La soirée fut délicieuse et je ne vis pas le temps passer, si bien que nous nous retrouvâmes chez moi enlacés sur la moquette devant la cheminée.

      J'ouvrais les yeux et me retrouvais en face de mon pseudo père noël, il avait l'air inquiet.

-Alors ? me demanda t'il.

J'étais encore sous le choc de cette rencontre et ne trouvais rien à répondre.

Mon visiteur semblait de pus en plus perplexe.

      La dernière chose à laquelle je m'attendais venait de m'arriver et j'y avais pris le plus grand des plaisirs. Je décidais d'accepter ce cadeau, c'est à cet instant que mon salon commença à tanguer, les objets autour de moi subissaient des déformations étranges.

      A mon réveil des coups sourds résonnaient dans ma tête, à vrai dire je ne compris que ces coups n'étaient pas dans ma tête que lorsque la porte de mon appartement vola en éclats laissant pénétrer une horde de personnages en uniformes de police.

      Je ne sais combien de temps s'est écoulé depuis cet instant, lorsque l'on est mort le temps n'a plus d'importance, ce que je sais c'est d'avoir vu ces policiers s'approcher de moi avec prudence, on aurait dit qu'ils avaient peur que je les morde. Ils s'écartèrent pour laisser passer un individu en blouse blanche, visiblement le médecin légiste, il regarda mes pupilles, pris mon pouls puis me tournant la tête en tout sens déclara que j'étais décédé dans la nuit par strangulation.

      De la jeune femme il ne restait plus que quelques effluves de son parfum et son écharpe de soie autour de mon cou.

 

MONTATAIRE le 25 Novembre 2003                

     

  

            

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Style : Nouvelle | Par hoogewys patrick | Voir tous ses textes | Visite : 598

Coup de cœur : 12 / Technique : 9

Commentaires :

pseudo : BAMBE

Extra, je me suis régalée de cette nouvelle, ravie d'être tombée sur vos écrits.

pseudo : margoton

Très bien écrit, et pas banal !