Publier vos poèmes, nouvelles, histoires, pensées sur Mytexte

Outr'Atlantique par Alyanie

Outr'Atlantique

Du 28 juillet au 28 août, je partais en avion pour mon rêve de l'année : voyager au Québec, seule avec mes deux oreilles.



PREFACE.

Il y a de ces voyages. Il y a de ces voyages qui traversent les océans et d'autres qui enjambent les déserts. Il y a de ces voyages qui dérangent les passants et d'autres qui illuminent nos visages. Il y a des voyages solitaires et il y a des solitudes voyageuses. Il y a de ces voyages qui nous enferment et d'autres qui nous envolent. Il y a de ces voyages amoureux et il y a les voyages passionnants. Il y a de ces voyages qui commencent et d'autres qui ne se terminent jamais... tout à fait.


Et il y a ces voyages où l'on trouve des yeux qui nous aiment, des oreilles dans lesquelles se percher. Des voyages où les paroles s'installent dans les petits cahiers et où les visages nous restent si familiers. Il y a de ces voyages qui voyagent.


On raconte que rester, c'est exister. On raconte aussi que voyager, c'est vivre. Qu'est-ce que le voyage, qu'est-ce que la vie. Il semble que tous deux sont une seule et unique chose : un parcours où la route importe plus que la destination. Oui, et si l'endroit où nous allons importe beaucoup moins que le chemin que l'on prends pour si rendre. Et si, en fin de compte, réussir dans la vie importait beaucoup moins que réussir sa vie. Réussir le quotidien, savourer le paysage, les odeurs, les passions, le temps. Admirer les choses inutiles, concevoir que la station service est un arrêt plus important que l'arrivée à l'hôtel. Tout ça, simplement pour s'égarer un peu, se perdre par plaisir.


Parce que, au fond, tout est une question de perspective.
Et toi, où regardes-tu?


Par Eric Lambert, chroniqueur à BlogTélé [radio UQAM]



JOUR 1 :

Les nuages sont tellement gros.


Au décollage de l'avion ils étaient tous là, majestueux cumulus. Nous les traversions, frôlant des bouts d'aile les hautes falaises brillantes de ce blanc céleste et les vagues cotonneuses qui émulsionnaient au pied. Ils étaient tous posés sur un plancher transparent et si je n'avais pas vu l'avion les traverser j'aurais pu croire y voir un autre monde. Un lieu supérieur où il était possible de vivre parmi les altesses changeantes.


Quelle surprise quand je vis furtivement par le hublot passer un autre gros avion transportant des voyageurs. Je pouvais alors me dire qu'il était loin par sa taille de fourmis, mais aussi suffisamment proche pour l'analyse visuelle car de mon hublot je pus deviner qu'il appartenait à la flotte d'Air France. Une terrible comparaison pouvait alors se mettre en place, entre cet avion et les nuages. Bien plus immenses encore que je ne l'imaginais ! Jamais mon esprit ne s'était vu au milieu de choses aussi énormes ! Une peur terrible me serrait alors la gorge, d'émerveillement aussi, et puisque ces sentiments n'œuvrent jamais à moins de trois : de plaisir.
Mon insignifiance ! Comme il est souvent difficile d'en prendre conscience !


Suite à ça je pus plus facilement réfléchir, et plus justement je pense. La distance énorme que je parcourais, je la sentais dans mes échanges intercellulaires. Comme si chacune de mes cellules et tour à tour se mettaient à dire à sa voisine : « Non mais tu te rends compte ? Tu aussi tu le ressens ? » Et l'avion avançait encore, luttant plus ou moins faiblement contre le vent et les mauvais esprits de l'océan.


Par un heureux hasard de billetterie je fis le voyage en classe club. Mon voisin était sympathique, nous causâmes poliment comme deux voyageurs, l'un qui rentre chez lui, l'autre qui rentre à l'aventure, peuvent causâmes poliment, et pas autrement. Ceci suffit à me faire reprendre l'orgueil que possède tout humain et qui lui est nécessaire d'avoir pour ne pas tomber en adoration devant la Magie et le Mystère, et continuer d'avancer vaillamment.


A présent je suis à Montréal. Eric m'a bien accueillie chez lui, comme promis. J'ai triché, j'ai inscrit « jour 1 » alors que nous sommes en réalité le second jour de mon voyage. Il est deux heures du matin. J'ai peut-être dormi deux ou trois heures. Et chose qui va vous paraitre étrange, c'est l'angoisse qui m'a réveillée. Non parce que je suis seule, Eric ayant rejoint une fille pour la nuit, mais parce que subitement je me suis imaginée au milieu d'un Montréal imprenable. Oui, j'ai peur au beau milieu de mes songes. Je me suis dit que peut-être... je n'étais pas à la hauteur (en insistant bien sur le haut) de ce que j'espérais.


D'écrire, cela me soulage, et décrire, je le ferai aussi pour vous. Je vais tenter d'avoir l'œil percé et perçant, d'avoir l'œil fort. De chercher en chaque chose la trace des mots, pour ensuite les décalquer sur ces pages.
Il me faut un plan de Montréal !

JOUR 2 :

Huit heure est passé, Eric n'est pas arrivé encore, toujours à son RDV nocturne et galant avec la fille du photomaton à ce que j'ai compris. J'ai envie de sortir pour aller téléphoner à Benjamin, lui dire que je pense à lui. Je vais le faire, je vais laisser un mot à Eric et je vais aller à une cabine téléphonique. C'est parti !


**


J'étais bien partie pour la cabine téléphonique mais je n'avais pas pris le numéro de Benjamin. Alors je retourne à « mon » appartement. (je pense pouvoir utiliser le dénominatif mon, même si je l'occupe peut-être illégalement : Eric en discutant avec ses amis ce a bien dit « chez nous ») Finalement le téléphone de Benjamin a sonné dans le vide. Je lui ai laissé un message sur le répondeur. A la bibliothèque avec le portable d'Eric j'ai pu consulter mes e-mails : mon message vocal lui a fait plaisir.


Aujourd'hui a été une excellente journée. Il me reste 4 tickets de métro, une carte de Montréal et une bien meilleure connaissance du quartier dans lequel je vis. Je sais à qui je peux facilement dire bonjour ou non dans l'immeuble, quoique puisse dire Eric. Et peut-être n'ai-je finalement pas si tord. Dans la rue préférée d'Eric que je nommerai « les trois états d'âme de Denis » - le vrai nom est bien moins cool - un québécois me demande de l'aider à tenir un vélo pour qu'il puisse sortir le sien propre. Eric me fit alors la remarque que j'étais bien plus sociale que lui, que jamais on ne lui avait demandé quoique ce soit. Juste avant nous parlions de l'activité hypocrite qu'il pouvait mener sous ses lunettes lorsqu'il suivait son chemin dans sa vie citadine, peut-être le p'tit help du cycliste était-il un signe. Il me permit en tout cas d'enfoncer le clou : « Voilà, à cause de tes lunettes lorsqu'on te regarde pour chercher quelqu'un d'autre on ne fait que de se voir soi-même [dans le reflet] » Les paroles ne sont peut-être pas textament exactes, elles plurent à Eric qui voulait immédiatement les porter à l'écrit. Ma suffisance me dit qu'elles le méritaient.


Je ne suis arrivée à Montréal qu'hier et pourtant j'ai l'impression que beaucoup plus de temps s'est écoulé tellement mon cœur soupire différemment. Le ciel est dégagé, les cumulus ont fondu, la ville me parait à présent beaucoup plus abordable. Je comprends mieux. J'ai appris aujourd'hui à croiser sur le chemin M. et Mme Autrui sans toute fois renier mon ouverture que je compte bien entretenir (et n'est-ce pas à cela que m'encourage Chance, l'esprit malin de mon sillage ?) Lorsque le croisier est en vue je le regarde mais sans le fixer pour ne pas qu'il sente mon aliénation au milieu montréalais (on sait jamais comment ça peut réagir un autrui) Je maintiens le contact quelques secondes, sans ignorance, sans chercher à éviter quoique ce soit et avec franchise. Finalement et comme si de rien n'était mon regard dérive vers le haut afin de libérer le croisier.


Je pense que le sommeil me prendra cette vie-ci.

JOUR 3 :

J'aurais aimé appeler mes parents ce soir, malheureusement il est 2h du matin chez eux. Dommage : je suis sûre que ça leur aurait fait plaisir.


Je suis vannée ! J'ai marché dans le vieux Montréal toute l'après midi. Seule, mais chose étrange, je ne me suis pas sentie solitaire. Je parlais toute seule, à moi-même, en marchant quelques pas, ou à Chance ? Il faut continuer à marcher.


Un père basané m'arrête sur le chemin de la tour de l'horloge. Il voulait que je le prenne lui et sa famille (devant un plan ??) J'ai mis tout mon cœur dans cette photo tellement ils étaient fières d'être ici serrés tous les trois sur l'écran 5 cm du photographier.


C'est à la tour de l'horloge au bout de la pointe de Bonsecour qu'on entend les rugissements de La Ronde, comme s'il s'agissait d'un monstre nautique caché dans les courants du St Laurent et que les petits bateaux à moteur partaient à sa chasse.


Je monte les 192 marches de la tour jusqu'au 51,1 mètres au dessus du niveau de la mer (la première marche était à 14,2 mètres) La vue n'était pas des plus formidables mais quel orgueil était-ce de se retrouver au dessus de tout, que rien ne puisse échapper à notre regard. Même pas l'envol des princesses fourmis que j'esquivais sur la route en recherchant les différentes étapes de mon parcours.


Montréal doit être une ville pour les touristes ; sans savoir où j'allais, ni où j'étais, en suivant simplement les rues les plus accueillantes, je tombais toujours sur ce que j'avais prévu de voir. Je vagabondais tranquillement, me retournant souvent car c'était toujours derrière moi que je voyais les plus belles choses. C'est bon à savoir, non ? Lorsqu'on voyage, il faut toujours penser à regarder derrière soit. Et quel dommage que je ne sois pas comme mes maitresses de primaire, que je n'aie pas de yeux derrière la tête !


Je voyais un bel escalier imposant de bois. Quelqu'un à coté de moi me dit que c'est très joli. Je lui réponds que je suis d'accord. Il continue à me parler, mais oh misère !! Il parle anglais ! Instinctivement je lui avais répondu dans sa langue, mais suivre une vraie discussion est bien malheureusement au dessus de mes capacités. Il était lui-même bien désolé que je ne parlasse pas sa langue.


« Frustra legis auxilium quaerit qui in legem commitit » à voir la rudesse de l'architecture de la cours d'appel du Québec je ne sais pas quoi en penser... Une porte retirée derrière des colonnes magistrales si épaisses que même le plus puissant sumo n'aurait pas peur de s'appuyer dessus !


Il s'est mis à pleuvoir alors je décide de me rendre à l'insectarium. Je reprends donc le métro pieds fatigués. L'instectarium fermait à 18h00 et il était 18h30 lorsque je suis arrivée. Fermé. Je m'en doutais quelque peu mais j'étais tout de même bien déçue d'avoir usé un ticket pour ça. Alors pour faire fructifier les 2$ du métropolitain je fis tout le tour du stade olympique prenant la tour inclinée sous tous ses angles.
Puis finalement je rentrais.

JOUR 4 :

Eric n'arrivera qu'à midi, j'ai toute la matinée devant moi ! J'espère juste qu'il n'aura pas trop de retard car j'aimerais aller à l'insectarium cette après midi et le truc ferme tôt.


Je n'ai pas fait une grande marche, il ne me reste que 2 tickets pour le métro et cette denrée rare et précieuse doit être utilisée avec parcimonie.


J'ai appelé mes parents. Encore un échec, le téléphone a sonné dans le vide. Petit message sur le répondeur. J'aurais aimé parler autrement que seule comme une folle bipolarisée.


Peut-être l'avez-vous remarqué, l'encre a changé. Le stylo magique s'est vidé de son sang et je n'ai pas pris de cartouches dans ma valise et j'en viens à croire que ces recharges n'existent pas ici ! Tous les stylos sont billes. Ceci explique peut-être la surprise d'Eric lorsqu'il a vu que ma plume fétiche était une vraie plume et au sens propre ! Alors bon j'ai acheté un erzats. Un stylo à encre liquide, bille 0.5, plus quelques tubes de colle bon-marchés pour 2.25$ En revenant je passe devant une papeterie qui était fermée lorsque je l'avais remarquée à l'aller. J'entre. Du beau papier, de belles couvertures mais toujours pas d'encre en cartouche. Les tubes de colle coutaient 2.28$ pièce. Ah la ! Et dire que si j'étais passée vers cette papeterie 5 min plus tôt, il aurait été 9h00, elle aurait été ouverte et j'aurais acheté mes fournitures ici au lieu de pousser plus loin pour trouver les mêmes marchandises au quart du prix. A 5 min près. Et oui, le temps c'est bien de l'argent !

JOUR 5 :

45 min qu'il y a entre notre appartement et l'insectarium. Peut-être existe-t-il plus court mais je n'ai pas envie de chercher. Ce chemin-ci me plait. Je traverse un hall immense et désert. Des voix fantômes résonnent contre les panneaux qui ne conduisent plus personne et les portes condamnées. Un hall si grand construit pour n'accueillir plus que du vide !


Finalement j'arrive vers une porte qui n'est pas menottée par de grosses chaines tristes. Je sors. Saviez-vous qu'il y avait des mouettes à Montréal ? Pas de petites sternes ridicules, non, de vraies mouettes et grosses mouettes telles que ça ne m'étonnerait pas qu'elles soient macrophages (le mot n'est pas le bon, mais le vrai m'échappe) En sortant du hall ce sont ces mouettes qui j'entends crâner avec leurs loopings au dessus de nos têtes. Par centaines à certaines heures ! Puis je repasse dans un lieu fantôme. Condamné lui encore. La peine de mort n'est plus au Québec, alors c'est vide que nous utiliserons. Un verre dans lequel avait été servi un bel apéritif et dont il ne reste plus que la tranche de citron.


Vendredi matin, Eric avait prévu de faire le ménage. Son appartement était rempli du gel de l'inactivité ainsi que de ma gêne indictée. Je suis donc partie, lui laissant la corvée. Hier soir je n'ai pas écrit dans ce cahier (vous comprendrez pourquoi) alors je profite de cette lâche sortie pour remédier à cet oubli.
Je continue à recopier mes pensées d'hier :


J'ai été déçue par l'insectarium. J'y suis allée pour trouver et toutes les informations que m'apportait la visite paraissaient désuètes. Cependant leur collection d'insectes est impressionnante et je n'imaginais pas que les bibittes avaient autant marqué les cultures avant d'avoir vu cette exposition.


Mon billet incluait également la visite du jardin botanique. Heureuse surprise, j'eux beaucoup plus de plaisir à visiter le jardin que l'insectarium. Il est magnifique ! Magnifique ET serein.
J'ai cependant l'impression qu'une erreur a été faite quelque part : un tel jardin n'a pas du tout du être planté pour les visiteurs à photographier, et pourtant ! Mais où sont les montréalais ?


Eric n'a pas vu Sarah hier soir (la fille du photomaton) il a donc passé la soirée avec moi. Nous sommes allés à la Grande Bibliothèque pour régler quelques histoires d'argent, puis nous nous sommes rendus dans une pharmacie. Vous vous demandez probablement ce qu'on a été faire dans une pharmacie ! Héhé ! Amis français, il faut avoir de bons professeurs pour reconnaitre les pharmacies ici : ce sont des Intermarché ! On y trouve absolument de tout : de la crème pour le visage jusqu'à la papeterie en passant par les périphériques informatiques ! (de tout sauf des cartouches pour stylo magique) Et finalement nous avons loué un film car c'est moins cher que le cinéma et que s'il est trop tard on peut le mettre sur pause puis s'endormir.
Je vais retourner à l'appartement pour voir si la machine est terminée.

JOUR 8 : ---ET C'EST LA QUE L'ON DECOUVRE MONTREAL !---


Voyager, déjà c'est partir puis prendre des photos. Des belles, d'artiste, de cartes postales et puis quand le temps ne s'y prête pas des photos tout court. Ceci dit ces jolies preuves ne suffisent pas pour empâter les amis. Alors on prend son courage à deux mains, on s'ouvre le ventre et on se farcie de paroles, de sons, d'anecdotes pour les r'ingurgiter une fois à la maison. Ca fait toujours sourire et au moins c'est de l'authentique.


Mais ces deux activités sont remplies de douleurs et d'efforts et tant qu'on voyage pour le plaisir autant en garder un peu pour soi. C'est là, quand on a recousu nos entrailles pour bien tout garder au fond (car tout voyage a pour vocation de nous changer, et si on ne change pas, c'est qu'on n'a, soi-disant, pas assez voyagé) que plein de sueur et de conviction, l'on sent l'essence de l'Ailleur se déposer sur notre peau.


Rien ne peut précipiter la réaction pour ça il ne faut qu'attendre subir sentir et ne pas se frotter le corps trop fort avec le savon sous la douche, laisser le tout s'imprégner modestement dans les pores.
Bien sûr, l'essence de l'Ailleur est volatile. Au retour elle ne restera que quelques jours, deux semaines pour les plus chanceux, mais sa mémoire, elle, reste là. C'est cette chose inexplicable et magique du voyage. Si on s'en contente lorsqu'on nous demandera alors ton voyage on ne trouvera rien à dire hormis un sourire et on se sent bête. L'essence de l'Ailleur est personnelle.


C'est pour avoir un peu de ce parfum que je marche des heures dans Montréal sans réfléchir, juste en sentant avec le nez les yeux et les oreilles. Le bleu fantass des gratte-ciels, les épices devant les restaurants chinois et leurs sauces, le dur ciment des trottoirs parfois gris, parfois blancs, parfois tachés de gommes ou gravés de cœurs ou de je t'aime gertrude. Sans réfléchir mais sans cesser de penser. Je m'infiltre dans les rues. On nous regarde souvent mon sac et moi, alors lui leur tire la langue l'air de dire « Et toc c'est moi qui balance ! » J'espère me perdre. Les chemins descendent un peu, au damne de mes baskets montent beaucoup dans des rues plus ou moins friquées, devant des parcs plus ou moins parqués ou près des musées plus ou moins payants. Jamais gratuits. Les dons volontaires sont là pour combler l'inégalité des chances.


Soudain je vois la rue Simpson. Je la connais. Je cris « ô grand shit ! » vu qu'il semblerait que ce soit une divinité locale et que j'aurais préféré rester perdue encore un peu. Ma tête me dit où je suis sur la carte même si je ne l'ai pas devant les yeux mon sac pèse sur mes épaules, mes baskets me serrent.
« Ok ok ! Je m'arrête ! » que je leur dis un peu triste. Voilà maintenant il me faut un parc, un vrai, un grand avec des bancs et des arbres pour que je puisse manger mon launch et l'écrire.
Je ne suis pas sur un banc et j'écris sur mes genoux alors je vais bouger un peu car j'ai froid et j'ai mangé et parce que les mouettes macrophages me font de l'œil et j'ai peur.


**


J'ai envie de m'asseoir là mais ya une statue et ça ne se fait pas de s'asseoir au pied d'une statue surtout si c'est un homme et qu'il est nu. Je ne dois pas lui plaire car je le fixe comme c'est pas permis et lui reste de marbre.
Un peu plus loin deux autres statues encore. Un petit garçon et sa petite sœur. Ils ne doivent pas avoir bien compris que les statues se posent sur les estrades car ils sont assis sur un banc. A coté d'eux il y a un gars et lui il bouge. Il fait mine de ne pas avoir vu les statues. Ignorer, c'est ce qu'il y a de mieux à faire quand quelqu'un n'est pas à sa place. Le petit garçon chuchote à sa sœur et le gars, le vivant, ne chuchote à personne.
Je remarche.


**


C'est drôle cette petite série de promenades, de paragraphes, entrecoupés de « ** » comme si il pouvait y avoir de la pub dans un cahier de voyage ! Pour vous la pause c'est quand je change de lieu, pour moi c'est quand j'écris. Vous voyez les vacances, mes vacances, dans le reflet d'un building.


Pas très loin de toute à l'heure je suis. Même marbre, même assise en tailleur mais une statue pudique qui ne nous laisse qu'entrevoir ce qu'elle représente. De l'art abstrait ça s'appelle. Le jardin de la place, celui qui gravite autour de la fontaine où se baigne ordinairement la statue, se plantent de petites fleurs rouges et blanches et de feuillages. Autour une allée de cailloux gris sur lesquels on a posé un filet de peur qu'ils ne s'envolent.
Les gens mangent leur diner avec un accent québécois. Ils mangent tous la même chose, j'aimerai savoir qui fournie : c'est appétissant. Les femmes en plus de leur sandwich ont des carottes et du piment cru, les hommes un second sandwich. Ce sont ces mêmes bouches qui, hommes ou femmes, constituent la communauté lettrée du métro. A certaines heures on en voit des brochettes entière qui portent leurs gros bouquins brochés et qui lisent ça très très vite quand la valisette démarre. Je préfère cela à ceux du matin avec leur périodique car ils sont plus doux et moins pressés aux changements de ligne.


**


Face à Banana République il y a des troncs d'arbres sur le sol. Il est écrit à coté d'eux « made from paper » Ils mentent car ils sont faits à la bombe les troncs mais ils marquent l'entrée d'une rue plus touristiques que buisnesstique. Autour de la place les gens bien habillés qui blablatent anglais pour pas que je comprenne croquent dans des pommes et non plus dans des sushis en barquette.


La symbolique de la statue fait qu'elle est bien plus imposante qu'abstraite. Ya même un homme qui est assis sur son pavillon ! Une femme fait le tour de la place. Elle me tend quelques cd : « ... you ... ike... free cidi ? » que j'arrive à capter. Je refuse, mais l'homme à coté de moi qui m'énerve parce qu'il nourrit les pigeons et que ça le fait rire en accepte deux. Pourquoi ça m'énerve qu'on nourrisse les pigeons à coté de moi ? Parce qu'ils arrivent en horde, tous aussi bien les beaux à collier vert que les déplumés, les parkinsonniens. Ils écrasent les moineaux qui ne peuvent plus hocher de la tête vers vous avec curiosité. Ce qui m'énerve encore plus c'est que l'homme qui est à coté de moi, une fois qu'il a finit de nourrir les plus moches il plit retraite en pliant ses jambes sur lui, bien protégé en haut du petit mur. Comme ça la razzia de pigeons ne l'embête pas. Mais moi je ne peux pas faire ça car j'écris sur mes genoux. Et l'homme rigole bêtement. En plus il parle anglais.


Les rues touristiques sont faciles à reconnaitre : on y trouve des musiciens qui tendent leur chapeau et des stands de bijoux sans chez-soi faits main, ou parfois à la pâte fimo. Sur ces rues on trouve des églises aux murs gris et des statues symboliques.


**

Dans ces rues on trouve également des hommes noirs en chemise démodée regarder avec amusement des touristes en t-shirt blanc mettre des valises lourdes comme des diplodocus dans une voiture. Mince ! Il m'a vu ! Je baisse les yeux. Pourtant il n'y avait ni délit ni diable, ni dans mon regard, ni dans celui de l'homme noir.Dans les rues touristiques quand il y a des travaux on s'excuse pour le désagrément, ailleurs on vous explique que c'est pour votre bien ; on y trouve des glaciers, des touristes qui rétrécissent les voies de circulation car ils ne comprennent pas que le feu vert ne vient pas plus vite quand on s'approche de lui, des sexshop car l'avion ne change personne et que c'est moins gênant ici qu'à coté de chez-soi et finalement des scènes de spectacle qu'on démonte pour tout remonter ailleurs. Non ! Tout n'est pas jetable ! On recycle ici !!

"Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur est interdite"

Style : autre | Par Alyanie | Voir tous ses textes | Visite : 368

Coup de cœur : 10 / Technique : 7

Commentaires :