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Clara par H.A

Clara

 

Clara

 

 

Clara venait d'avoir seize ans et se préparait à rentrer en première littéraire au lycée Belgrand à Paris. C'était une adolescente, passionnée depuis sa plus tendre enfance par les lettres. En effet, dès l'âge de deux ans et demi, elle savait déjà reconnaître un A d'un E. Elle lisait, par ailleurs beaucoup et se mettait à corps perdu dans son travail. En somme, une élève, à qui un brillant avenir était promis, puisqu'elle se destinait à enseigner. C'était une jeune fille insouciante, qui n'avait guère de problèmes et qui s'entendait à merveille avec ses parents, leur accordant tout leur temps, car c'était leur unique fille.

 

 

            Elle avait les cheveux châtains, mi longs qui tombaient sur ses épaules, la taille svelte, pas très grande et qui n'avait pas la prétention d'être spécialement belle à l'image de ces top-modèles que l'on voit, aujourd'hui dans les magazines. Mais dont la sensibilité extrême et la maturité touchaient énormément. Elle ne s'intéressait pas à la mode, aux dernières tendances des adolescents et ne s'entendait qu'avec un public adulte, puisque n'ayant, pour ainsi dire, pas d'amis de son âge, car les trouvant trop immatures. En somme, Clara voulait déjà que l'on la considère comme une femme et non plus comme une enfant. Donc en définitif, une jeune fille ayant tout pour être heureuse : un très bon niveau scolaire, aimée et choyée par tous ceux qui croisaient son passage.

 

 

            Cependant, quelque chose semblait lui manquer : elle se sentait vide et se demandait parfois, à quoi servait sa vie. C'était comme un mal, un mal qui la rongeait de l'intérieur, qu'elle n'arrivait pas à expliquer. Souvent, quand celle-ci ne pratiquait pas son activité quotidienne favorite : la lecture, Clara, pour fuir la routine, se plaisait à s'enfermer dans la vie trépidante d'un Tom Sawyer ou d'un David Copperfield en autres... Ses héros avaient toujours des aventures extraordinaires et finissaient toujours par s'en sortir, même après de dures épreuves. Elle aussi, aurait aimé avoir une vie exaltante comme eux, au lieu d'avoir cette existence bien rangée et sans anicroche, qu'elle exécrait quelquefois. Souvent, la jeune fille regardait la photo de Douvres où elle posait auprès de ses parents et qui lui était si chère. Comme ils étaient heureux ! C'est d'ailleurs pour cela que Clara aimait cette photo : à cette époque-là, elle était loin des examens, et cette vie lui suffisait. Mais, avec son regard de jeune fille, elle vit sans savoir pourquoi, sur celle-ci qu'il manquait quelqu'un. Pourtant, sa famille était au complet, alors pourquoi éprouvait-elle ce sentiment ?  Pourquoi cette sensation de vide ? La jeune adolescente comptait sur cette année pour tenter d'élucider ce mystère... Donc, Clara rentrait en première littéraire, retrouvant ses amis et était heureuse de commencer une nouvelle année, avec, cependant une grosse appréhension vis-à-vis du bac anticipé, examen décisif pour l'obtention du bac littéraire. Elle eut son emploi son temps et rentra chez elle, le soir, curieuse de savoir à quoi allait ressembler ses profs cette année.

 

 

            Tout allait bien et la vie poursuivait son cours : elle avait eu quinze de moyenne générale, au premier trimestre et ses profs semblaient satisfaits d'elle mais Clara n'avait toujours pas élucidé ce sentiment de mal-être qui l'oppressait de plus en plus. C'est alors qu'un jour, elle fit une rencontre surprenante, à la sortie du lycée :

 

Un homme, la trentaine, pas très grand, cheveux et petit bouc bruns, les yeux si immensément bleus, qu'elle aurait pu s'y plonger, était là à l'autre bout de la rue. Elle l'avait déjà remarqué sur la route menant au lycée, et à vrai dire, il la fascinait, sans qu'elle susse vraiment pourquoi. Bien souvent, la jeune fille était trop mal à l'aise pour oser l'aborder car se jugeant trop gamine pour un homme de cette trempe et passait son chemin, sans y prêter plus d'attention. Ce n'est qu'au bout de la vingtième fois, quand elle croisa son regard, que celle-ci ressentit au fond d'elle-même, d'inexplicables sensations : elle tremblait toute entière, ne pouvait plus parler, son cœur battait à tout rompre : ce regard si intense, qu'elle ne savait décrypter la pénétrait, l'envahissait. Elle se sentait défaillir, surtout quand il lui disait bonjour. Sans raison, elle se sentait pousser des ailes à son approche quand il lui souriait. Mais, choisissant de ne pas prendre en compte ce trouble, passait son chemin, sans toutefois pouvoir expliquer la sensation de bien-être qui la prenait et ce pourquoi elle avait chaud, froid, grelottait quand elle le regardait.

 

 

Ses parents avaient remarqué son étrange bonne humeur et la surprenaient même à chantonner, à rêvasser. Mais, se disant qu'elle avait peut-être rencontré quelqu'un, ils ne firent pas attention à ce changement.

 

 

Un jour, Clara réussit enfin à parler avec cet homme qu'elle admirait tant et qui lisait en elle, comme dans un livre ouvert. C'était à la sortie du lycée, il s'approcha d'elle :

 

 

« Bonjour, jeune demoiselle.

 

_ Bon... Bon... Jo... Jour, dit Clara intimidée.

 

Il rit :

            _ Te fais-je donc peur à ce point ?

 

            _ Non.

 

            _ Eh bien, alors pourquoi bégaies-tu ?

 

            _ Je ne sais pas.

 

            _Tu as quel âge ?

 

            _ Seize ans, monsieur.

 

            _ Tu es en quelle classe ?

 

            _ Première littéraire.

 

            _ Ah, l'année du bac anticipé, difficile, n'est-ce pas ? Mais je suis sûr que tu dois t'en sortir haut la main ! Une jolie demoiselle comme toi, réussit forcément dans tous les domaines, non ? ! Ton petit copain doit en avoir de la chance !

 

            _ Je n'ai pas de petit copain, avoua Clara, les joues en feu.

 

            _ Oh, c'est un scandale, quelle bande de petits imbéciles, ils ne savent pas ce qu'ils perdent, une jeune fille, belle, intelligente !, s'insurgea Marc.

 

_ Vous vous moquez de moi... Je n'ai pas de charmes tout le monde le sait !

 

_ Mais non, pas du tout, je le pense sincèrement. Aimes-tu Charles Dickens et Mark Twaïn ? Ce sont mes auteurs préférés.

 

_ Moi aussi, s'exclama Clara.

 

_ Et vous ? Comment vous appelez-vous ?

 

_ Marc.

 

_ Etes-vous marié ?

 

_ Non, je suis célibataire, aucune femme n'a voulu de moi. J'ai été d'échecs en échecs... je suis sans amis et personne ne m'attend...

 

_ Oh, c'est injuste ! , s'exclama Clara, je suis sûre que vous êtes un type bien !

 

_ Mais, tu ne me connais que depuis aujourd'hui.

 

_ Et alors ?

 

_ Alors, rien.

 

Ils rirent :

 

_ Que faites-vous comme métier ?

 

_ Eh, petite curieuse, lui répondit-il d'un air taquin, tu m'en demandes trop, je ne peux pas te le dire, c'est trop personnel !

 

_ Ah bon... dit Clara, déçue.

 

_ Ne sois pas triste, ma puce, dit-il, en lui passant la main dans les cheveux, mais je ne peux rien dire.

 

_ Je comprends, dit Clara, troublée. Oh ! Il faut que j'y aille, sinon mes parents vont s'inquiéter, dit-elle affolée, en ramassant ses affaires.

 

_ Pouvons-nous revoir demain soir, à la même heure et ici.

 

_ Oui, entendu.

 

_ Au revoir, jolie demoiselle.

 

_ Au revoir Monsieur.

 

_ Appelle-moi Marc et tutoyons-nous. Qu'en dis-tu ?

 

_ D'accord, Marc. A demain.

 

A demain, jolie demoiselle. »

 

 

Clara, était subjuguée par sa nature : toute cette force et fragilité dans un seul homme...  Soudain, la vérité se fit jour : ce manque qu'elle éprouvait, c'était la privation d'amour ! Ce pourquoi, elle se sentait si mal, si vide, c'était parce qu'elle n'avait pas trouvé l'âme sœur : ce que celle-ci éprouvait pour Marc, non pas sans honte, c'était encore et toujours l'amour, que Clara avait d'ailleurs, de plus en plus de mal à réprimer...

 

 

 Souvent, elle et Marc refaisaient le monde, et regrettaient tous deux de ne se voir que peu souvent dans la semaine. Lui, non plus n'était pas insensible à la jeune fille, qui était si fragile et qui avait tant de similitude avec lui. Sa pureté et son innocence le touchaient au plus profond de son âme, mais réprouvant cette pensée, au regard de la différence d'âge, n'en parlait à personne, de peur de passer pour un pervers. Déjà, il sentait les regards assassins qui se posaient sur lui, quand elle partait en cours.

 

            Mais tout ceci, Clara l'ignorait. Elle ne voyait plus que lui, ne respirait plus que par lui, et son bonheur était tellement perceptible, que ses parents, un jour, lui demandèrent ce qui la rendait si heureuse. Elle leur répondit qu'elle n'avait rien de spécial, aussi quand ils l'interrogèrent au sujet d'une possible rencontre, la jeune fille leur déclara que non, se doutant que ces derniers ne seraient pas d'accord, s'ils apprenaient la vérité. Mais tout cela, Clara n'y portait pas attention et retournait rêver, oubliant même qu'à la fin de l'année, elle passerait son bac anticipé. Ses profs lui demandaient eux aussi la raison de cette joie si soudaine. Elle leur rétorqua la même chose. Puis, à la fin de la journée, courait le retrouver.

 

 

            Puis vint ce beau matin de janvier, où après deux semaines de vacances interminables, la jeune fille le rejoignit en larmes :

 

« Ma petite Clara, pourquoi pleures-tu ? demanda Marc, affolé. Que s'est-il passé ? Toi, qui est si heureuse, d'habitude ?

 

_ Je n'en peux plus... Tu me manques trop, je ne peux plus vivre sans toi. Je... Je ne peux plus le supporter... Je me suis roulée par terre en hurlant ton nom, je ne peux plus vivre comme ça...

 

_ Pourquoi me dis-tu cela ?

 

_ Parce que je... je t'aime... Gros moment de silence. Je sais qu'il ne faut pas mais je ne peux plus cacher ça ! Je t'aime, c'est comme ça et peu importe ce que tu diras, je....

 

 

A ce moment là, il l'avait embrassé tendrement, oubliant même où il était... Elle, se sentit défaillir, quand une pléiade de sensations l'envahirent : c'était chaud, c'était bon...Lui, la sentant trembler, la serra plus fort, contre sa poitrine, de peur de la perdre. Elle rouvrit ses yeux brillants, à cause des larmes qui coulaient sur ses joues et le regarda :

 

 

« Tu as raison, on ne peut pas continuer comme ça, lui dit-il, d'une voix douce. Ca faisait longtemps que j'en avais envie, mais je ne faisais rien pour ne pas te blesser.

 

_ Mais qu'est-ce qu'on va faire ? dit Clara, affolée.

 

_ Ne t'inquiète pas, je m'occupe de tout. Rejoins-moi, demain soir, après les cours.

 

_ Et si on nous surprend ?

 

_ Ne t'inquiètes pas mon amour, tout ira bien.

 

_ Et mes parents ? Qu'est-ce que je vais dire à mes parents ?

 

_ Tu n'as qu'à leur dire que tu vas chez une amie, pour faire tes devoirs. Comme tu es sérieuse, ils ne diront rien.

 

_ Oui mais...

 

_ Mais quoi ? Tu m'aimes non ?

 

_ Oui.

 

_ Bon et bien, à demain, alors.

 

Je t'aime, Marc. »

 

Ils s'embrassèrent encore avant que Clara ne disparaisse, au coin d'une rue, tous deux pressés d'être à demain.

 

Ce soir-là, Clara ne dormit pas : celle-ci était tiraillée entre l'amour insensé qu'elle éprouvait pour Marc et l'interdiction qu'avaient formulé ses parents, car très catholiques : ne jamais sortir et faire l'amour avec un homme, sans protections et de surcroît, avant le mariage, parce que contraire, à la morale. Mais, ils ne pouvaient pas comprendre : c'était LUI, son idéal, c'était avec lui, qu'elle voulait se marier, avec lui qu'elle voulait avoir des enfants. En un mot, l'homme de sa vie. De plus, Clara n'avait pas de préservatifs et ne prenait pas la pilule. Ses parents, lui avaient formellement interdit de faire ça et pourquoi ? Parce qu'ils avaient peur, que cette dernière tombe enceinte ?  Clara était convaincue que ça n'arrivait jamais la première fois. Le sida ? Les MST ? Tout ça c'était des histoires pour faire peur aux jeunes filles...Pour une simple question de religion ? De toute façon, celle-ci ne l'intéressait pas, car c'était la  cause de bien des guerres, dans ce bas monde. Non, sa décision était prise : elle irait jusqu'au bout avec Marc, peu lui importait qu'il ait trente ou vingt ans, celle-ci le prenait tel qu'il était. Peu importe ce qu'on pourrait penser, elle l'aimait.

 

 

Le lendemain, Clara ne fut pas attentive en cours, car étant dans un état fébrile, ne pensant qu'au soir. Comme convenu, cette dernière avait dit à ses parents, qu'elle devait aller chez une amie pour faire ses devoirs. Et ils l'avaient cru, eux qui d'ordinaire, décelaient le moindre mensonge, car celle-ci n'avait jamais su mentir. Son professeur de français, s'inquiétant de la voir ainsi, la prit à part et lui dit :

 

« Qu'est-ce qui se passe Clara ? Ca ne va pas ? Tu es toute pâle ?

 

_ Rien, Monsieur.

 

_ Je te trouve bien rêveuse aujourd'hui, toi qui d'habitude, est à la première à nous donner ton avis, sur les œuvres que nous étudions, et qui aujourd'hui reste silencieuse... De plus, tes notes dégringolent : de quinze, tu es passée à douze de moyenne. Alors qu'y a-t-il ? Tu peux m'en parler, tu sais ?

 

_ Rien, juste un coup de fatigue, c'est tout Monsieur.

 

_ Tu en es sûre et certaine ?

 

_ Absolument.

 

_ Bon et bien ça va, alors. Tu peux sortir, mais ressaisis-toi vite, d'accord ?

 

_ Promis, monsieur. Au revoir.

 

Au revoir. »

 

Enfin, la sonnerie symbolisant la fin des cours retentit et la fin de journée arriva, enfin. Clara fut la première à sortir de la salle, mais alla tranquillement vers la sortie du lycée, pour que personne ne se doute de rien. Ses pas étaient pesants, son cœur battait à tout rompre. Au bout d'un moment, ne le voyant pas arriver, elle faillit repartir quand il survint dans une grosse voiture. La jeune fille y monta et Marc l'emmena dans un hôtel, situé non loin de chez elle.

 

 

C'était un grand bâtiment, tout de marbre avec d'innombrables fleurs de toutes sortes, arrangées en bouquets dans des vases, de chaque coté du hall. A gauche, un escalier en colimaçon, en marbre lui aussi, avec un tapis rouge, menait à l'étage. Au centre, un bureau et derrière celui-ci, cinquante-deux casiers avec le même nombre de clés, une pour chaque chambre. Devant, le gérant de l'hôtel :

 

_ Vous désirez, monsieur ? , demanda-t-il à Marc, tout sourire.

 

_ La chambre sept pour une heure, dit Marc, s'empressant de rajouter : Et qu'on ne me dérange pas.

 

_Est-elle majeure ? , demanda le réceptionniste, l'air inquisiteur.

 

Clara regarda Marc, l'air inquiet.

 

_ Elle vient d'avoir dix-huit ans, dit Marc, d'une voix sèche.

 

Le réceptionniste hocha la tête, d'un air entendu et tendit la clé à Marc, qui tenant toujours d'une main chaude et rassurante celle de Clara, qui ne semblait visiblement pas rassurée, car lui serrant très fort la main...

 

Tous deux commencèrent à monter. Puis arrivés en haut, ils traversèrent un long couloir, peuplé de chambres pour arriver enfin, à celle portant le numéro sept. La jeune fille entra et découvrit toute émerveillée, une alcôve de velours rouge, avec au fond de la pièce, une coiffeuse. Au centre de celle-ci, trônait majestueux, un lit à baldaquin rouge, digne des rois de France, drapé de satin et avec deux oreillers en plumes d'oie. Marc ferma la porte à clé et aussitôt Clara, les yeux ruisselants de larmes, courut vers lui. La prenant dans ses bras, il lui dit :

 

« Là, là... Ma chérie, tout va bien. Je suis là, maintenant.

 

_ Oh, Marc, il ne faut pas... C'est de la folie... Qu'allons-nous devenir si on apprend ça ?

 

 

_ Calme-toi, ne t'inquiète pas, personne n'en saura rien. Et quand bien même, ils connaîtraient la vérité, nous nous aimons et c'est ce qui compte. Je ne laisserai plus jamais personne nous séparer, tu m'entends ?

 

_ Oui mais... j'ai peur, tu comprends ? Je... je... je n'ai jamais...

 

 

Chut, chut, tais-toi, laisse-moi faire... N'aie pas peur, tout ce passera bien, tu verras... »

 

 

            Quand Clara reprit connaissance, Marc était allongé à ses côtés, trempé de sueur, lui caressant les cheveux et disant des mots d'amour. Elle ne savait plus exactement ce qui s'était passé, ni où elle était. Cette dernière se rhabilla, puis lui jura de revenir le lendemain.

 

 

            Et cela, dura semaine après semaine. Cela faisait maintenant trois mois que tout cela se passait, jusqu'à ce que la jeune fille s'inquiète : elle avait des malaises de plus en plus fréquents et ne pouvait plus rentrer dans ses pantalons. Clara ne lui en dit rien et anxieuse, alla acheter un test de grossesse. Ce dernier se révéla positif : elle était enceinte de deux mois. Alors une détresse naquit en elle : devait-elle garder cet enfant ou l'abandonner ? Devait-elle le dire à Marc ? L'assumerait-il ? Et s'il la quittait ? Qu'allait-elle dire à ses parents, qui se doutaient sûrement de quelque chose ? Et cette dernière semblait entendre son bébé parler :

 

 

 « Maman, je suis trop à l'étroit et je sens que tu n'as pas l'air bien ! Ne m'abandonne pas ! Ne me tue pas ! Qu'as-tu fait de ta vie ? Où est papa ? Tu ne manges plus, ne dors plus, tu es stressée... Ne rejette pas la faute sur moi. Je ne suis pour rien dans tout ça. Ca fait deux mois que tu me permets de vivre et tu m'en veux déjà, tu me rends coupable de tes maux alors que je suis le fruit de l'amour... Tu n'es plus heureuse, je n'entends plus ton rire, que j'entendais, encore, il y a une semaine... Tu nous tues tous les deux... et je ne suis pas bien, dans ton ventre... Ma pauvre maman, qu'as-tu fait ? Quel sort me réserves-tu ? Pourquoi tout autour de moi, il fait si noir, si sombre. Pourquoi, perçois-je au dehors, des éclats de voix, comme des disputes ? Pourquoi t'entends-je pleurer ? Pourquoi es-tu si malheureuse ? Maman, ma petite maman, j'ai peur. Qui sont ces gens que j'entends crier si fort contre toi, contre nous... »

 

            « Ces gens », c'étaient les parents de Clara, qui voyant ses résultats scolaires chuter, ainsi que les multiples avertissements pour des absences injustifiées, se posaient des questions. Par ailleurs, la voyant, de plus en plus grosse, avaient tout compris. Ils lui demandèrent qui était le responsable, mais en vain. Elle ne voulait dire son nom, déclarait que malgré tout, voulait garder cet enfant, avec ou sans le père... Un jour, une dispute éclata plus violente que les autres, alors qu'elle rentrait du lycée : c'était le jour du bac anticipé blanc :

 

 

« Alors ??????? s'exclamèrent les parents, inquiets. Comment cela s'est-il passé ? Tu as réussi ou non ?

 

_ Eh bien non, je l'ai raté et je n'en ai rien à faire ! Il n'y a plus que l'homme que j'aime et mon bébé qui comptent maintenant ! Peu m'importe le bac ! Je vais bientôt donner la vie et cela est plus sérieux que ce maudit bout de papier que l'on appelle le bac !

 

_ Mais Clara ! Que vas-tu faire de ta vie ? Seule avec ton enfant ? Tu vas gâcher ta jeunesse !  dit sa mère d'une voix, essayant d'être calme. Je t'en prie ma chérie, je t'en supplie, pense à ton avenir ! Pense à nous !

 

_ Vous, toujours vous, avec vos principes et vos conventions ! Vous parlez de mon bébé, de mon avenir, sans savoir ce que je veux réellement... Et vous monologuez des heures entières sur ce petit être, comme si c'était un objet, mais c'est MON ENFANT ! La chair de ma chair, le sang de mon sang. Même si je ne l'ai pas voulu, en premier lieu, je ne pouvais pas me résoudre à tuer MON BEBE ! C'est tout ce qui me reste de Marc ! De l'amour que nous avons partagé, car quand il a appris qu'il était papa, il m'a quitté... Il y a une semaine, et j'en souffre atrocement car il est et restera l'homme et l'amour de ma vie, à jamais... Souvent, j'ai cherché à rejeter la faute sur ce bambin que je porte malgré moi, à le repousser, mais il n'a rien fait et n'y est pour rien dans tout ça ! Pourquoi punir un innocent, alors que la seule fautive, c'est moi ! Car finalement, je l'attendais depuis toujours ce petit bout ! JE L'AIME ! C'est toute ma vie ! Maintenant, il est là, et je ne peux plus reculer, je l'élèverai seule, puisque c'est mon destin. C'est comme ça et vous ne pourrez pas m'en empêcher ! En plus, il me donne de plus en plus de coups de pied, et je trouve ça touchant... Pour la première fois de ma vie, je me sens exister, non plus en temps que jeune fille mais bien en temps que femme à part entière. Il me fait vivre ! Moi qui sans Marc, croyais mourir... Ce petit être qui grandit dans mon ventre, c'est ma revanche sur la vie, ma seule chance. Je vis et j'existe par lui. Maintenant, j'ai le sentiment d'être utile à quelqu'un...

 

_ Mais Clara, tu as perdu l'esprit ! Petite sotte, tu ne sais pas ce que tu dis ! Abandonne-le, enfin un bât...

 

Clara n'avait pas laissé sa mère terminer sa phrase. Elle l'avait giflé.

 

_ Oh ! , dit sa mère choquée.

 

_ NE REDIS PLUS JAMAIS CE QUE TU VIENS DE DIRE ! , rugit Clara. J'ELEVERAI CET ENFANT AVEC OU SANS VOTRE ACCO...

 

Elle n'eut pas le temps de finir, son père l'avait souffleté à son tour.

 

_ SORS DE CETTE PIECE TOUTE DE SUITE ! , hurla le père.

 

C'était souvent comme ça que cela se terminait. Aussi, quand les disputes éclataient trop fort, la jeune femme se réfugiait dans sa chambre, où elle pleurait, en restant fixée sur un objet en particulier : une photo, prise à Douvres, avec ses parents, le sourire aux lèvres. Elle avait dix ans sur cette photo. Ce jour-là, pour la première fois, celle-ci partait en vacances avec ses parents, les serrant dans ses bras. Clara s'était amusée follement sur le pont d'un bateau. Ils étaient heureux et insouciants à cette époque. Qu'en restait-il maintenant, si ce n'est une famille déchirée...

 

            Cela fait maintenant deux mois que mon petit garçon est né et que je n'ai pas revu Marc...

 

 

 

Je lui dédie cette histoire...

 

 

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Style : Nouvelle | Par H.A | Voir tous ses textes | Visite : 653

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Commentaires :

pseudo : volatile

Bravo pour ce texte, H.A. La frontière entre amour et abus est parfois mince et l'histoire qui est arrivée à Clara arrive certainement souvent. Il faut rester maitre de son corps et de son esprit. Un mauvais point pour Marc qui a fait preuve de lâcheté. J'espère qu'avec le temps Clara a fini par renouer avec ses parents qui, il est vrai, devaient être perdus de voir leur fille grandir si vite tout d'un coup. Moi même, que ferai-je si ma fille était enceinte à 16 ans? Je ne sais pas. Et comment se prénomme-t-il, ce petit bonhomme? Enfin, je n'ai pas compris à qui était dédié cette histoire: à ce fils né d'un amour peut-être consumé trop vite, ou à son père, qui n'a pas su assumer son acte? Reste que cette histoire est racontée de très belle manière, où l'on voit que c'est vraiment une histoire d'amour.

pseudo : ficelle

Très beau texte, H.A. Très belle histoire d'amour narrée avec pudeur. Quant à Marc, je n'oserais même pas le juger, et encore moins le traiter de lâche. C'est comme ça, un enfant est né de l'amour entre 2 personnes aimantes. Mais tu sais, le temps arrange souvent les choses, surtout quand il y a eu de l'amour entre les êtres. Bienvenue à ce petit garçon, fruit de l'Amour.

pseudo : H.A

Cette histoire est totalement inventée, je l'ai écrite de le cadre d'un atelier d'écriture ! Merci pour les compliments que j'estime trop beaux pour un petit écrit ! Mon héroine a dédié l'histoire à Marc, l'homme qu'elle a toujours aimée et qui restera dans son coeur à jamais !

pseudo : ficelle

alors, cette histoire dévoile ton talent. Bravo

pseudo : volatile

Je suis désolé, mais quand Marc lui dit "je ne laisserai personne nous séparer" et qu'il la quitte en apprenant qu'elle est enceinte, si ce n'est pas de la lâcheté, c'est peut-être de l'irresponsabilité, de l'immaturité, de l'incompréhension, de l'incapacité, de je ne sais pas quoi d'autre, mais l'amour a été vite laissé de côté par cet homme. Je lui laisse donc mon mauvais point. Et comme je le dis à la fin de mon premier com', cela reste au départ une belle histoire d'amour, écrite de très jolie manière. Néanmoins, la fiction peut rejoindre trop vite la réalité. Et je ne sais toujours pas comment s'appelle ce gamin...

pseudo : H.A

Il n'a pas de nom, ce gamin c'est volontaire, afin que tout le monde puisse laisser libre cours à son imagination ! Marc n'est pas un lâche au contraire, il a laissé à Clara, je pense, la plus belle preuve d'amour: un fils ! Il a choisi de partir dans l'ombre, à mon avis pour ne pas faire de traces et ainsi éviter les relations conflictuelles qu'il aurait pu avoir avec les parents de Clara ! Car n'oublions, pas elle est mineure... Merci pour tous vos commentaires !!!!

pseudo : ficelle

merci H.A, j'aime ce dernier commentaire, et te suis à 100% dans ton choix de ne pas juger cet homme, et de regarder cette histoire comme une belle histoire. Wahou...

pseudo : volatile

J'ai simplement lu "...quand il a appris qu'il était papa, il m'a quitté...". Manifestement, nous n'avons pas la même vue, ou plutôt sensibilité, sur ce sujet qui m'est important et ce n'est pas grave... Au moins cela nous fait réfléchir. Il y a quelques années, j'avais écrit une chanson dont le refrain était: "SOS, mère en détresse, il t'a laissé tombé, maint'nant faut t'débrouiller".

pseudo : H.A

Je respecte tes opinions et je comprends tout à fait ta colère mais j'ai parlé au nom de Clara, car je crois que ce qu'elle voulait au fond d'elle même, c'est surtout un souvenir de Marc et elle désirait cet enfant, elle n'a besoin de personne pour l'élever. Mon histoire, je pense, ne se termine pas dramatiquement mais sur une note positive: cet homme l'a fait devenir femme, ce qu'elle avait besoin d'être, et au fond d'elle, j'en suis sûre qu'elle savait très bien que ça ne pouvait pas durer éternellement. J'ai avant tout voulu décrire une passion brûlante, lancer un véritable hymne à l'amour... et pas faire un texte tragique ou polémique mais je respecte ce que tu ressens et tous vos commentaires sont constructifs ! Merci !

pseudo : volatile

No problemo, H.A. Suis majeur, vacciné, père d'un fils et d'une fille. Je ne suis pas en colère et suis plutôt maintenant en train de sourire à l'idée de ce premier texte (réussi, et nous te l'avons dit chacun à notre manière) publié par tes soins et qui suscite passion plus que polémique, réflexion plus que condamnation. C'est cela aussi, MyTexte. A bientôt sur un autre de tes textes, avec très grand plaisir. Welcome et meilleurs voeux.