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Bill M - partie 3 par G. Aers

Bill M - partie 3

Partie 3

 Chapitre 1

Après quelques jours de chevauchée, Bill arriva en Californie, état où il avait passé son enfance et une partie de son adolescence ; lorsque ses parents l’avaient emmenés, lui et ses trois frères, dans leurs folles courses à la pépite d’or lors de la ruée qui précéda celle de 1849, Bill ne savait plus trop quand exactement. Ils avaient quitté leur petite ville à la frontière texane ; abandonnant la maison qu’ils avaient entrepris de construire un peu plus tôt et pour laquelle ils avaient dû économiser de longues années, vu la maigreur de leur salaire d’enseignant, un beau jour d’été, à l’approche des récoltes, les arbres croulant sous le poids des fruits. Une fois le chariot chargé de tous ce qu’ils possédaient, ils étaient partis en direction de la Californie, où la rumeur disait qu’"on" avait trouvé de l'or. Bien plus tard, ils se rendirent compte que c'était faux, et ils regrettèrent d'avoir tout quitté aussi vite. Ils retournèrent alors à Smith City, qu'ils avaient quitté près de dix ans plus tôt, et entreprirent de tout recommencer à zéro, enseignant dans la petite école de la ville et envoyant Bill et ses trois frères au collège, fait assez rare à l'époque. Bill fut séparé longtemps de ses parents, son collège se trouvant à près de 50 kilomètres de la maison familiale …

Quelques minutes plus tard, il arriva à San Angel, qui était alors une petite ville, avec une population qui atteignait difficilement les 5 000 habitants. Une grande rue, bordée de maisons basses avec de petits jardins arborés, menait à l’église, grand bâtiment recouvert de chaux bâti au 17ème siècle par des dominicains, surmonté de deux clochers imposants qui encadraient une tour sur laquelle était apposée une grosse horloge en fonte qui indiquait à ce moment 13h45. Devant l’église se trouvaient deux arbres, de part et d’autres du portail, probablement multi centenaires ; dont les troncs commençaient à se tordre sous le poids de leur âge imposant. Un peu plus loin s’élevait un kiosque en bois peint en vert, sur lequel était en train de jouer un orchestre de mariaquis devant une foule en extase et qui s’agrandissait à vue d’œil, les curieux accourant des rues environnantes.

Arrivé au bout de la rue principale, Bill tourna à gauche et aperçut au loin un hôtel, s’élevant majestueusement le long d’une rivière serpentant tranquillement à travers la ville, la séparant en 2 parties fort différentes.

De ce côté-ci de la rivière se dressaient les quartiers plus riches de la ville, formant des cercles concentriques autour de l’église, chaque cercle s’éloignant de cette église constituant une couche plus pauvre de cette population de riches. Avec leurs maisons pour la plupart en pierre, qui donnaient l’impression de pouvoir résister aux pires catastrophes, les enfants toujours bien habillés et suivi à la trace par leur nounou, ainsi que les rues aussi propres que les rues pouvaient l’être à cette époque, ces quartiers contrastaient beaucoup avec les quartiers pauvres, que les autorités avaient vainement tentés de cacher à la vue à l’aide de quelques arbres faméliques, et qui s’étalaient par delà un petit pont en pierre qui surplombait la rivière, avec ses maisons qui donnaient l’impression qu’elles allaient s’écrouler au moindre souffle de vent, ses enfants jouant à moitié nu avec des bouts de ferrailles et d’autres objets qu’ils avaient sans doute trouvés par terre, au milieu des détritus jonchant les rues.

Chapitre 2

Bill arriva devant l’hôtel et descendit de cheval. Il entra et fut surpris de découvrir un intérieur plutôt luxueux pour cette époque, habitué qu’il était à loger dans de véritables taudis qui avaient été construits à la va-vite. Il prit la direction de la réception, qui se trouvait au bout de ce grand hall (il devait bien faire 15 m de long sur presque autant de large), dont les murs étaient recouverts de chêne. Le sol, probablement ciré à la graisse de bison, brillait et Bill s’amusa à s’y observer en attendant son tour. Lorsque ce fut enfin son tour, Bill demanda une chambre et prit la direction que le réceptionniste lui indiqua.

Quelques minutes plus tard, après avoir traversé un couloir interminable, il arriva devant sa chambre, la n° 184. Il introduisit la clé dans la serrure et tourna la poignée. La chambre était spacieuse, les murs étaient peints en bleu et une grande peau de bête était étendue devant le lit. Des tableaux, peints par des artistes locaux et représentant divers paysages de la région, ornaient les murs. A gauche de l’entrée se trouvait une salle de bain, où trônait majestueusement une baignoire en cuivre qui brillait de mille feux. A côté du lit se tenait une table de nuit en acajou, table où était posé un petit réveil doré qui égrenait le temps qui passe de ses tic-tac réguliers. En face du lit, contre le mur opposé, il y avait une table, ou plutôt un bureau, avec des motifs floraux sculptés sur chaque pied. Sur cette table était posé un vase de fleurs, qui embaumaient l’air de la pièce d’un parfum entêtant. Enfin, une grande porte fenêtre, masquée par des rideaux en flanelle rouge, donnaient sur un balcon, qui donnait lui-même sur la rue et la rivière.

Bill prit un bain, et descendit dîner. Fait assez unique, l’hôtel disposait de son propre restaurant, particularité fièrement annoncée par un panonceau apposé à côté de l’enseigne. Soudain, Bill s’arrêta net dans les escaliers. Il crut avoir aperçu, au loin, qui se dirigeait vers le restaurant, une vieille connaissance. « Ce n’est pas possible … » se dit Bill ; et pourtant … ces bottes en peau de serpent, cette veste en peau d’ours usée jusqu’à la corde, ces long cheveux sales qui descendaient jusqu’en bas des épaules et cette longue barbe poivre et sel, il les reconnaîtrait entre mille. Intrigué, il suivit l’homme de loin. Bill choisit de s’asseoir 2 tables plus loin que l’homme, afin de pouvoir l’observer discrètement.

Mais c’était peine perdue, l’homme l’avait repéré depuis longtemps, plus précisément depuis qu’il avait pris place à une table proche de la sortie et éloignée des fenêtres … une vieille habitude qu’il avait prise il y a 5 ans à peine, lorsqu’ils avaient failli se faire descendre, son ami et lui, par des tireurs embusqués, qui s’étaient cachés dans une maison de l’autre côté de la rue. Il en avait réchappé mais il avait dû abandonner son ami, qui lui avait été blessé, à contre cœur, alors que le shérif et ses adjoints accouraient, menottes à la main, dans le but de les arrêter tous les deux, leur plan de les abattre ayant (en partie du moins) échoué. Depuis, chaque jour, il repensait à lui, se demandant ce qu’il était devenu … quand soudain il l’aperçut qui entra dans le restaurant. Pas tout à fait certain que ce soit lui, il décide de l’observer plus attentivement, du coin de l’œil, pour pas se faire repérer : les coups de feu partent vite dans le coin quand on à le malheur de regarder quelqu’un avec un peu trop d’insistance.

Après plusieurs minutes d’observation, Bill décida de se lever et d’en finir une fois pour toutes : il prit la direction de l’homme attablé, tout en espérant ne pas se tromper et ainsi avoir l’air complètement ridicule, et, une fois arrivé près de celui-ci, demanda : « Sam ? ». L’homme se retourna, un sourire aux lèvres, et répondit : « Bill, vieille canaille ! Je te pensai, au mieux, derrière les barreaux ? » « Non je me suis échappé … boah … il y a bien 4 ans maintenant … Qu’est ce que tu fais là ? » « Je parcours le pays, sans destination précise, à la recherche de petits travails, afin de me faire un peu d’argent … tiens là par exemple je viens d’arriver … je convoyai du bétail appartenant à un riche éleveur de Xochicotzengo. »

Chapitre 3

Tandis que les deux amis se racontaient leurs dernières péripéties, au même instant, dans le bureau du shérif (qui se trouvait au bout de la rue principale, non loin de l'église dans une petite maison en pierre), Max Trowney, shérif de San Angel depuis près de 10 ans, se servait un café, lorsque le télégraphiste, Jack Alexander, entra. Surprit, le shérif renversa du café sur sa chemise neuve.

« Shérif, shérif, dit le télégraphiste tandis que Max ronchonnait dans ses moustaches, essayant tant bien que mal de limiter la catastrophe en épongeant le café, un télégramme pour vous ». Max arracha le télégramme des mains de Jack, non sans lui adresser un regard meurtrier. Tout penaud, celui-ci sortit. Le shérif lut le télégramme ainsi rédigé.

« Avis à toutes les villes californiennes – STOP – un dangereux bandit – STOP – Bill Murray – STOP – a été aperçu se dirigeant vers la Californie – STOP – Prière de l'arrêter – STOP – Attention il doit être considéré comme très dangereux – STOP – Plus d'informations suivent par Pony Express – STOP - »

A peine le shérif avait-il terminé de lire le télégramme et portait sa tasse de café à ses lèvres qu'un homme entra brusquement, ce qui valut à la chemise du shérif une nouvelle tache. L'homme évita de justesse la tasse que le shérif lança de colère. « Pony Express, dit l'homme, j'ai du courrier urgent pour vous ». Il tendit la lettre à Max, qui ne dit même pas merci. L'homme sortit, se disant que les gens de cette ville était décidément très mal élevés, lançant des tasses à la tête des gens et ne disant même pas merci. Ils étaient de plus très sales, continuant à porter des chemises alors qu'elles étaient pleines de tâches bizarres. Sa chemise à lui n'était peut être pas très propre, mais, au moins, lui avait une excuse: il passait ses journées à cavaler à toute vitesse afin d'apporter le courrier que l'on lui confiait à leur destinataire.

Max ouvrit le pli, qui contenait le portrait de Bill ainsi qu'une brève description de tout ses méfaits. « Sale bobine » se dit-il. Il faut dire qu'avec son gros nez cassé et toutes ses cicatrices, on ne peut pas dire que Bill était ce que l'on appelle une gravure de mode. Le shérif mit sa veste, fourra le portrait dans sa poche et rentra chez lui changer de chemise; ce qui lui valut des remontrances de sa femme quand elle vit l'état de celle-ci. Pour ne pas devoir supporter les commentaires de sa femme durant tout le repas, il décida d'aller manger au restaurant de l'hôtel si tranquille situé près de la rivière.

Il reprit donc son cheval et traversa la ville, sa maison étant située à l'autre bout de San Angel, saluant les passants et rassurant les gens s'enquérant de la santé de son fils, qui avait attrapé la varicelle quelques jours plus tôt. Il s'arrêta au passage chez « Mason Tobacco's » afin de s'acheter du tabac à chiquer, son pêché mignon depuis qu'il avait 15 ans.

Un peu plus tard, il arriva enfin à l'hôtel. Il descendit de son cheval, l'attacha à l'endroit prévu à cette occasion et entra. Il salua Henry, le réceptionniste, et prit la direction du restaurant. Il se dirigeait vers sa fenêtre préférée, qui donnait sur le jardin arboré et regorgeant de fleurs de milles et une senteurs, lorsqu'il eut le regard attiré par deux hommes en train de discuter et de rires bruyamment. L'un des deux hommes ne lui était pas inconnu, mais il ne parvenait plus à se rappeler où il l'avait déjà vu. Max s'assit donc à sa table et le serveur lui apporta la carte. Il commanda un steak bien cuit et des pommes de terres sautées. Lorsqu'il eut terminé il demanda l'addition au serveur, qui lui apporta, non sans jeter au passage un regard désapprobateur au deux hommes qui riaient décidément fort bruyamment. C'est au moment où Max fit tomber le portrait de Bill en prenant l'argent dans sa poche qu'il reconnu l'homme qui avait attiré son attention lorsqu'il était entré tout à l'heure. Max se leva, sortit son arme de son étui et dit: « Eh, vous! Restez où vous êtes et les mains en l'air! ». A cet instant, Bill aperçut l'étoile du shérif et dégaina prestement, déclenchant une fusillade. Les clients encore présents se mirent à l'abri comme ils purent et se dirigèrent vers la sortie, aidés par le personnel du restaurant. Bill et Sam profitèrent de la confusion pour s'enfuir par une fenêtre restée ouverte non loin d'eux. Max aperçut Sam qui était en train de sauter par la fenêtre et se lança à leur poursuite. Le temps de se frayer un passage parmi les clients qui continuaient de vider les lieux, ne se rendant même pas compte que les deux criminels s'étaient enfuis, et de sortir, Max eut tout juste le temps d'apercevoir Sam et Bill grimper sur leurs chevaux. Le sherif monta sur le sien et poursuivit les deux bandits qui se dirigeaient vers la sortie de la ville. Mais bout de quelques mètres Max tomba et se rendit compte que les attaches de sa selle avaient été sabotées. Il remonta a cru sur son cheval mais Sam et Bill avaient eu le temps de disparaître. Dépité, il fit demi-tour et se rendit au bureau du télégraphiste afin de prévenir les shérifs de la région qu'il avait vu Bill et qu'il était accompagné d'un autre homme.

A suivre

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