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L'Insaisissable par valvali

L'Insaisissable

Je suis insatisfaite, insatiable, insaisissable, je suis née pour tuer. Je prends la vie comme je fais l'amour. Ce soir, je vais faire l'amour pour prendre une vie. Je suis...Une femme de l'ombre qui glisse entre tes doigts, te consumant de l'intérieur. Le maître du jeu n'est autre que moi, il ne peut en être autrement.
Femme issue de mon imagination, tu es la main qui guide l'épée qui portera le coup fatal, qui me soulagera de tous mes démons.
Durant toute une année, ma vie sentimentale n'a été rythmée que par des aventures plus piètres les unes que les autres. Des hommes rencontrés au hasard d'une rue, dans une discothèque. Je suis née pour tuer. Je suis le double de moi-même, la femme que tu regretteras d'avoir croisée un jour. Je suis née pour tuer.

Ce soir, enfin, j'existe. À l'état de fœtus durant toutes ces années, tu viens de m'enfanter pour mon plus grand plaisir, ma jouissance n'aura d'égal en ce bas monde !
Pour cette soirée si singulière, j'avais choisi une robe rouge, en mousseline, longue, très près du corps, fendue sur la cuisse gauche à tel point qu'on distinguait le bord de la dentelle de mon bas noir. Cette robe, une seconde peau, me rendait encore plus désirable. Les fines bretelles laissaient apparaître mes épaules si frêles, on aurait presque eu envie de les effleurer pour confirmer le sentiment de douceur qu'elles évoquaient.

Debout, face au miroir, je m'admirai une dernière fois. Au moment où j'allais détourner les yeux, elle m'interpella. Celle que je n'ose nommer avait enfin pris la parole. Je la fixais. Elle était sublime ! Voluptueuse ! Renversante ! Elle me défia du regard, je hochai la tête. Nous étions prêtes. Femmes unies pour quelques heures, nous n'avions qu'un seul dessein, assouvir notre vengeance.
La tâche allait être aisée, ces mâles en mal de femelles étaient des proies si primitives!

Il était 23h30. Ma destination était la boîte de nuit à la mode. Devant la discothèque, la file d'attente paraissait interminable. La plupart étaient accompagnés, moi j'étais seule, du moins pas tout à fait, mon double était présent.
À l'intérieur, la musique battait son plein, l'atmosphère était grisante, je m'y sentais à l'aise. Au bar, je pris un whisky coca que je bus d'un trait. L'ambiance, entraînante, m'attirait vers la piste. Je commençais à me déhancher ; musique et l'alcool m'enivraient. La sensualité qui émanait de mon corps formait un halo qui me plaçait au-dessus de toutes les autres jeunes femmes. Hum ! Mes mains partaient de mon visage, s'attardaient sur mes lèvres, mon cou, frôlaient ma poitrine, descendaient le long de mes hanches! Je soupirai, envahie par cette volupté, transportée dans mon monde.
Autour de moi, les hommes commençaient à se montrer, attirer par une femme qui semblait faire l'amour avec la musique, une femme issue d'un autre temps. J'ouvris enfin les yeux, jugeant ainsi cette coure masculine, ces proies si dociles, si misérables, attirées par la chair...Ils étaient là ! tous ! C'était à celui qui aurait le plus beau ramage ! Peu m'importait, mon choix allait se porter sur le plus prétentieux, le plus sûr de lui : L'arrogant ! Très vite je le remarquais, nos regards se croisèrent...Le jeu de la séduction pouvait débuter ! Au rythme de la musique, nos corps se rapprochaient, se cherchaient, pour enfin se trouver. Nous dansions l'un contre l'autre, je percevais la chaleur de son corps à travers ma robe, son sexe s'était rapidement durci au contact de mes cuisses. Sa respiration m'étourdissait. Il me demanda mon prénom, le sien était Stéphane. Très vite je lui fis connaître mes intentions. Naturellement il accepta. J'avais fait le bon choix : l'homme qui souhaitait s'envoyer en l'air ! une petite gueule d'amour !

Il me prit par la main, m'entraîna hors de la discothèque. Nous courûmes comme des fous, exaltés par notre désir. Des rires mêlés aux nôtres jaillissaient dans ma tête. Elle était encore plus présente à cet instant, attendant le moment propice pour se dévoiler... Elle me dictait ma conduite, décuplait ma libido, me rendait hystérique. Je ne me possédais plus, je devenais son esclave.
Enfin nous étions arrivés à l'appartement. Stéphane me servit un verre d'alcool que je bus d'un trait en le regardant droit dans les yeux, il fit de même. Assis, face à moi sur un fauteuil bleu ; la couleur dominante de son appartement, je le fixais et souriais... J'écartais les cuisses tout en relevant ma robe. Je ne portais pas de culotte... Engouffrée dans le fauteuil, ma respiration s'accélérait, mes mains parcouraient mon intimité, mon clitoris était à point.
-Laisse-moi te faire l'amour, t'accompagner où nulle femme n'a osé te guider !
Ce sont les dernières paroles qu'il entendit...

Je le conduisis dans la chambre à coucher. Il s'allongea sur le lit.
Les murs étaient ornés de miroirs. Elle m'assiégeait, milles visages identiques au mien, mais si différents me scrutait... Aucune échappatoire n'était envisageable. Je ne pouvais plus faire machine arrière, nos destins étaient liés !
Lui, Stéphane, ce jeune homme si sûr de lui, nu, étendu sur le lit, espérait passer une folle nuit d'amour, Moi, jeune femme si fascinante à ses yeux, je décidais que cette nuit allait être sa dernière !
Trop d'hommes étaient passés entre mes mains ! trop de déceptions avaient jalonné ma route ! je comptais mettre un terme à ce fiasco sentimental avec l'aide de ma complice de toujours, celle qui ce soir m'insufflait une force machiavélique.
Mon orgasme : je l'obtenais par procuration, je préférais savourer la jouissance de l'autre...Mais celui de ce soir, croyez-moi, va me transporter très haut sur l'échelle du plaisir !

Je le frôle, le respire...Hum l'odeur de sa peau, cet arôme qui ondoie autour de mon visage, qui l'effleure, qui pénètre mon corps, ce parfum, je le veux mien ! Mes narines s'affolent. L'odeur ! L'odeur chemine en moi, m'étourdie, m'exalte ! Elle est maintenant nichée dans mon bas-ventre, toute recroquevillée, prête à exploser et m'envahir de toute part. Il est étendu sur le lit, nu, vierge de tout artifice. Qu'il est beau ! Cet homme.
Elle le frôle, le respire, me domine ! Prends possession de mon corps ! S'immisce entre nous pour enfin m'asservir ! L'atmosphère érotique jusqu'alors, se transforme subitement en échange pornographique. Stéphane ! chevauché ! soumis ! subit les assauts sexuels de ce démon qui lui procure un plaisir méconnu jusqu'alors ! Nous avions rythmé notre corps à corps d'un commun accord ! Deux femmes ne formant qu'une seule ! une fusion de savoir sexuel pour atteindre le nirvana ! Je suis née pour tuer ! Je suis née pour tuer...

J'avais empoigné deux foulards en soie que j'avais jetés plus tôt sur le bas coté du lit. Toujours sur lui, son sexe coincé dans le mien, je nouais les liens afin qu'ils ne forment plus qu'un. Terrorisé ! subjugué ! Stéphane se laissait guider, dépassé par la fougue qui jaillissait de mon corps, de son corps ! J'encerclais son cou avec les foulards, et ligotais ses mains aux barreaux du lit à l'aide des deux extrémités restantes. La tête dans un anneau de soie rouge, les bras écartés, Stéphane comprit très vite que ce collet de soie pouvait être redoutable !
Je suis née pour tuer !
J'attrapais les foulards, les tendais doucement... Agenouillée au-dessus de lui, le regard déterminé, haineux, je tirais, tirais ! L'étau autour de sa gorge peu à peu l'étouffait ! Non ! Non ! criait-il ! Il gigotait comme un asticot, une misérable larve, petite bête insignifiante que tant de personnes prennent plaisir à écraser et voir les entrailles gicler sur les bas-côtés des souliers ! Le cou était raide ! Il me fallait maintenant redoubler d'effort pour arriver à mes fins, j'étais en sueur et des gouttes acides tombaient une à une sur son visage qui bleuissait. Ne pas relâcher la pression ! il se trémoussait, gesticulait avec tant de vigueur que je me serais cru sur un taureau effectuant un rodéo ! Ne pas lâcher prise ! être le maître ! Serrer ! serrer ! Jubiler ! jubiler jusqu'à obtenir une jouissance intérieure à la limite de l'évanouissement ! Des ricanements résonnaient dans ma tête ! Continues ! Ne t'arrête pas, m'ordonnait-elle ! En fait, c'était exquis ! Le voir mourir ! être le premier à subir mes assauts vengeurs !

Il s'écoula une dizaine de minutes avant qu'il ne s'éteigne. Violacé, violenté, nu, réduit à un corps sans vie, sans âme, il avait, au bout d'un temps, cessé de se battre contre son destin ! Durant toute cette lutte, ses yeux m'interrogeaient, me demandaient pourquoi. Pourquoi lui ? Parce que j'en avais décidé ainsi...Parce que maintenant je n'étais plus seule, parce qu'elle s'était introduite en moi pour ne plus jamais en sortir ! Parce qu'il fallait que j'évacue cette haine, cette exécration des hommes si profondément ancrée...Parce que : je suis née pour tuer !
À bout de force, je m'étais écroulée sur le lit. Ma respiration peu à peu redevenait normale. Je défis les liens de son cou tuméfié, il était marqué comme une bête au fer rouge !
Je m'assoupis rapidement, soulagée enfin de m'être ainsi lâchée et d'avoir évacuer ma douleur, ma haine.
Il était onze heures lorsque j'ouvris les yeux, tout naturellement, je fis une bise sur la joue de Stéphane comme pour le remercier de cette soirée si fantastique. Avec un large sourire aux lèvres, je quittais l'appartement. Je suis née pour tuer...Je m'appelle Valérie...
 
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Style : Nouvelle | Par valvali | Voir tous ses textes | Visite : 711

Coup de cœur : 12 / Technique : 10

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