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extrait de roman (chapitre 1: là où la neige tombe) par elsa

extrait de roman (chapitre 1: là où la neige tombe)

 

 

Chapitre 1

Là où la neige tombe

 

Des boucles blondes, une carrure tout à fait honorable, de grands yeux bruns innocents ; Julien avait tout d'un adolescent classique. Passionné de basket-ball, il se désintéressait des études facilement et menait une vie banale partagée entre ses cours et sa famille. Il savait, comme ses semblables, dissimuler ses sentiments, croire que ce qu'il vivait était toujours plus grave que le vécu des autres. Enfin, comme tout enfant de quatorze ans, il savait détester ses parents.

C'était un jeune garçon crédule, naïf, qui commençait par croire en tout ce qu'on pouvait lui raconter. C'était aussi un jeune homme silencieux. Non pas qu'il ne sache pas plaisanter, le rire étant sa défense préférée, mais il se taisait quand il s'agissait de choses l'atteignant directement, préférant s'enfermer dans ce monde, proche, de l'enfance où tout avait parut si simple, où ses parents avaient semblé tout savoir... Mais, inexorablement, il grandissait. Il allait bientôt quitter le collège, et ce qui l'attendait l'éloignerait de plus en plus de ce mirage de jeux qu'il avait tant affectionné, tout devenait compliqué et il se pensait déjà noyé sous les responsabilités qu'il n'avait pas encore.

Il oubliait donc le temps, refusant de le voir se dérouler, et continuait de taper du ballon en riant, jouissant des restes d'un temps qu'il croyait perdu.

Il ne savait pas que ce monde adulte le rattraperait bien trop tôt...

 

Cela arriva un soir de décembre, alors qu'il rentrait chez lui, fourbu, après un match de deux heures de basket-ball. Il portait son sac nonchalamment sur l'épaule et, n'ayant rien d'autre à penser, il se questionna sur son avenir ; que pourrait il bien faire ? Il ne savait rien faire de particulier à part ce sport... Voulant s'éviter de trop longues réflexions, il se mit plutôt à réfléchir à son match. Son entraîneur l'avait trouvé absent, ce n'était pas faux mais ce n'était pas sa faute ! Il avait plusieurs fois été pris de vertiges et n'avait put penser à autre chose, perdant souvent la balle de cuir.

Il s'arrêta, il venait de se rendre compte d'une chose inhabituelle, la rue était silencieuse. Cela n'arrivait jamais, il y avait toujours des gens qui passait par là, ou, du moins, des voitures. Même monsieur Rachid, l'épicier de la place, n'était pas là.

Julien sentit son ventre se nouer, quelque chose se passait et il ignorait totalement de quoi il s'agissait. Il pressa le pas.

Il était devant la porte de son immeuble lorsque quelque chose l'arrêta. Une toute petite étincelle blanche, glacée, venait de se poser sur sa main. A peine l'eut-il aperçut qu'elle fondit et disparut, ne laissant qu'une minuscule gouttelette. Julien regarda le liquide couler le long de son poignet et tomber sur le sol. Il ne bougeait pas.

A tout autre, ce petit flocon aurait parut banale, mais le jeune homme était convaincu que cette petite goutte d'eau givré n'avait rien d'une simple coïncidence climatique.

La pénombre du soir, la lumière étouffée des réverbères et la neige qui tombait le plongeait dans une atmosphère particulière qui se prêtait à toutes sortes de fantasmes.

Le jeune homme s'avança lentement. Il regardait, les yeux écarquillés, toute cette neige qui tombait comme jamais il ne l'avait vu. Il n'y avait pas de vent et le silence de cette chute de flocons le fit frissonné. Il ferma les yeux et offrit son visage à la neige. Elle lui picotait les joues et les rosissait. Il lâcha son sac de sport qui vint s'écraser sur le sol dans un bruit étouffé.

Alors qu'il tournait la tête vers son sac, et découvrit avec étonnement qu'une couche de neige s'était déjà formée. Julien fut alors pris d'un vertige violent. Il attrapa sa tête entre ses mains. Lors du vertige, il avait eut une sorte de flash dans lequel il avait vu, quelques secondes à peine, deux lames qui s'entrechoquaient dans un bruit métallique assourdissant.

Il se redressa, ses paupières papillonnèrent et le décor reprit son apparence initiale. Il y avait toujours cette neige qui s'épaississait de seconde en seconde.

Perdu, le jeune homme sentit la peur le prendre à la gorge, il suffoquait et, fébrilement, il voulut regagner son appartement. Il trébucha et, lorsque ses genoux heurtèrent la neige, il eut un nouveau vertige accompagné d'un autre flash. Quelques secondes il vit du sang coulé sur la neige, il le sentait si proche qu'il avait le sentiment que tout ce sang s'écoulait de son flanc.

Il voulut chassé cette vision qui lui faisait encore plus peur que la première, il voulut rejoindre sa vie douillette, retrouvé son salon, sa petite sœur, se battre avec elle afin d'avoir la console de jeux, enfin, rejoindre sa famille, sentir que le monde n'avait pas changé depuis cette neige.

Il ramassa son sac à la volée, la fermeture n'étant pas fermée, le ballon de cuir qu'il gardait toujours avec lui lors des matchs en sortit. Il roula quelques mètres dans la neige et s'arrêta. Julien hésita puis revint sur ses pas, il ne pouvait laisser un ballon dédicacé qui lui portait chance sous la neige ! Superstition ou accroche affective, ce ballon rentrerait avec lui.

Il était paniqué pourtant, ce silence l'oppressait et il avait de plus en plus le sentiment d'étouffer. Les vertiges le prenaient par vague, de plus en plus rapprochés. Une sueur glacée lui inondait les flancs. Ses paupières étaient lourdes comme la pierre.

Il titubait et manquait de s'écrouler à chaque pas, ne sachant comment fuir cette blancheur aveuglante.

Il finit par rejoindre le perron de l'immeuble qu'il habitait. Il se figea, la panique en lui s'échappa, il ne pensait plus, quelque chose le poussait à se retourner. Il laissa tomber sac et balle, sans plus s'en préoccuper, puis, lentement, très lentement, il pivota sur ses jambes. Son visage avait changé, là où quelques instants plus tôt, la bouche se déformait, crispée par la peur, il n'y avait plus qu'une mine résignée. Là où les yeux luttaient désespéramment pour ne pas voir la neige, il n'y avait plus qu'un regard décidé.

Il avança, un pas après l'autre, quelque chose le poussait à continuer. Il ne cherchait plus à comprendre, ni même à fuir, il voulait savoir.

Il obliqua dans un chemin et découvrit ce qui le poussait à continuer. Un châtaignier, qui ouvrait le parc à côté de chez lui, semblait dégagé un halo de lumière bleutée. Il s'approcha. A chaque pas, il sentait les vertiges et la peur revenir. Mais, les uns comme l'autre, il les chassa de son esprit, ne voulant penser qu'à cet arbre.

Il en fit le tour. La lumière devenait plus forte mais un buisson en cachait la source. Se baissant, Julien écarta les branchages. Ses yeux parurent encore plus grands que d'ordinaire lorsqu'il découvrit ce que ce buisson cachait. Sous les yeux de Julien, six cercles se dessinait et s'effaçaient sans relâche autour d'un septième. Les cercles, entremêlés, dégageaient une forte lumière argentée.

Julien ne pouvait détacher les yeux de ces cercles, hypnotisé par leur manège.

Le cercle du milieu irradiait plus fortement que les autres, il était assez large pour que l'on puisse y mettre une main.

Totalement absorbé par ce symbole, Julien posa, lentement, sa main  en son centre.

Une lumière aveuglante se fit alors, partant des sept cercles maintenant tous figés. Le jeune homme se sentit foudroyé de terreur mais, pourtant, il ne pouvait retirer sa main. Une force irrésistible en lui, lui ordonnait de ne pas bouger. Il fixait toujours le tronc de l'arbre et ne parvint pas à crier. Il lutta, puis, à bout de souffle, le cœur cognant contre sa poitrine à tout rompre, il se laissa choir. La seconde d'après, il s'évanouissait.

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