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Petit conte d'Ouesssant par gus lebrillet

Petit conte d'Ouesssant

Aëlle est une petite fille qui habite une maison de pierres aux fenêtres bleues.
Des deux côtés elle peut voir la mer.
À l'école, elle n'écoute pas beaucoup la maîtresse.
- Aëlle, où es-tu ? Ce ne sont pas les nuages qu'il faut regarder, mais ce que j'écris au tableau ! Si tu continues comme ça, tu n'arriveras jamais à rien !
Aëlle tourne quelques secondes la tête vers le bureau de la maîtresse et, comme elle ne comprend toujours pas ce charabia d'écritures, elle repose ses yeux sur un nuage.
Bien sûr, Aëlle est la dernière de la classe. Mademoiselle Da Silva a renoncé depuis longtemps à lui apprendre l'orthographe et les tables de multiplication.
Elle laisse Aëlle, au fond de la classe, passer son temps à regarder par la fenêtre.
Aëlle ne parle pas beaucoup aux autres enfants. On l'appelle Aëlle la rêveuse, Aëlle la muette ou, parfois, Aëlle la peintre.
Car Aëlle est très douée pour le dessin. C'est sa passion. Les mercredis matin, elle part de bonne heure avec crayons et couleurs à l'aventure sur son île. Elle longe d'abord la côte où elle s'agenouille presque à chaque fleur :
- Belles bruyères mauves ! vous êtes mes sœurs chéries !
Souvent, elle pose là son sac à dos, parmi une famille de papillons.
Puis Aëlle continue, vers l'intérieur de l'île. Elle s'arrête à l'enclos de son camarade Bisou. C'est un mouton noir et minuscule. On dirait une peluche à la taille d'Aëlle. La petite fille lui donne un bout de gâteau ou de carotte. Bisou lui lèche longtemps la main. Aëlle l'a dessiné une centaine de fois sous tous les angles. Avec ses cornes magnifiques, de profil, on dirait un prince. Quand elle a bien caressé le petit mouton, Aëlle l'embrasse et se dirige vers le sud. Au bout d'une dizaine de minutes, son goéland Christian descend du ciel. Il repère Aëlle de très loin. La petite fille lui donne aussi du pain et des morceaux de poissons jetés par les pêcheurs. Aëlle a réussi un merveilleux portrait de Christian avec ses ailes larges ouvertes.

Mais, la plus grande joie d'Aëlle, c'est de s'asseoir à la pointe de l'île, sur sa pierre secrète.
Là, elle tape trois fois du plat de la main à un endroit précis du rocher. Et tout à coup, Jojo apparaît. C'est un petit phoque gris très joueur. Dès qu'il voit Aëlle, il se met à cabrioler et à glisser sur le sable mouillé. Jojo obéit à Aëlle.
- Tourne la tête à droite ! à gauche ! Lève un peu plus haut les nageoires !
C'est bien mon Jojo ! Ne bouge plus !
Aëlle adore peindre Jojo. Elle lui réserve ses meilleurs morceaux de poisson.
Aujourd'hui, la maman d'Aëlle, qui fait son ménage, a ouvert les fenêtres pour aérer la maison. Tout à coup, un violent courant d'air emporte très haut dans le ciel tous les dessins d'Aëlle. Celle-ci court vite pour les rattraper mais certains, qui sont montés trop haut, ont disparu.
Tant pis, se dit Aëlle, j'en ferai encore de plus beaux !

Le mercredi suivant, au loin, Aëlle remarque une chose très étrange accrochée dans les ajoncs. C'est orange et blanc. Elle se presse pour aller voir. C'est un ballon avec une ficelle. Au bout de cette ficelle est suspendu un papier blanc avec une inscription. Difficilement, Aëlle réussit à lire :

Je suis la fée Andréa
Je t'invite dans mon château blanc
On viendra te chercher dans tes rêves.

Signé F.A

Aëlle se demande ce que cela signifie. Elle libère le ballon qui monte aussitôt dans le ciel. C'est peut-être une blague pense Aëlle. Mais, le soir, elle se couche plus tôt pour rêver plus vite. Et si c'était vrai ?
Aëlle a du mal à trouver le sommeil. Enfin, elle s'endort et rêve. Elle voit d'abord un papillon scintiller comme une étoile. Il est près de la côte et fait signe de le suivre. La mer est éclairée de l'intérieur par de fortes lumières. Les pétales des fleurs sont en or. La cloche de la chapelle abandonnée sonne comme pour un mariage. Les vagues parlent vraiment :
- Nous t'aimons beaucoup Aëlle ! répètent-elles.
Puis, près d'une croix, le merveilleux papillon disparaît et Aëlle reconnaît son prince Bisou.
Il porte un splendide chapeau de paille et des rubans multicolores accrochés dans sa laine.
- Monte sur mon dos Aëlle, je t'emmène ma princesse.
Les fougères s'écartent comme des personnes. L'air, sur le visage d'Aëlle est frais comme une caresse. Puis le petit mouton noir s'arrête.
- C'est ici Aëlle, tu dois descendre.
Bisou s'en va et Jojo le phoque entre par la porte d'une vague. Il est vêtu d'un élégant costume blanc.
- N'aie pas peur Aëlle, tiens-toi à mon cou, je t'emmène sur la mer.
L'eau est chaude comme dans un bain. Jojo dépose Aëlle au bord un rocher et plonge dans l'écume.
Christian le goéland attendait là avec des ailes gigantesques.
- Accroche-toi à mes plumes, nous allons voler très haut !
Aëlle n'a même pas le vertige. Tout en bas son île brille comme un diamant. Sa maison aux fenêtres bleues est petite comme un jouet. Christian se pose sur un nuage.
- On est arrivé belle Aëlle.
Sur le seuil d'un château de marbre fabuleux se tient une femme très jolie.
- Bonjour Aëlle, un ange m'a montré tes superbes dessins. Je veux t'aider, viens !
Aëlle prend la main de la fée Andréa. Elles entrent dans une classe belle comme le palais des glaces.
- Assieds-toi Aëlle et regarde.
La voix de la fée est très douce.
Tout autour d'Aëlle des anges apprennent à compter en chantant des comptines fantastiques.
Ils apprennent aussi l'orthographe en récitant des poèmes extraordinaires.
Aëlle, à son tour, se met à chanter et à réciter avec les anges.
En quelques minutes elle connaît ses tables de multiplication et son orthographe. Puis, elle se sent secouée. C'est sa maman qui essaie de la réveiller.
- Aëlle, debout ! c'est l'heure d'aller à l'école !
" Bonne chance ! " a le temps de lui souffler la fée Andréa avant qu'Aëlle ne sorte complètement de son rêve.

Aujourd'hui, à l'école, Aëlle répond avant les autres à toutes les questions. Mademoiselle Da Silva est très surprise. Elle n'en revient pas. Et, pour la première fois, les enfants voient la maîtresse regarder par la fenêtre, comme si elle cherchait à comprendre.

FIN

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Style : Poème | Par gus lebrillet | Voir tous ses textes | Visite : 1096

Coup de cœur : 13 / Technique : 9

Commentaires :

pseudo : Justine Mérieau

Un joli conte pour enfants, bien écrit et plein de poésie. Amicalement.

pseudo : gus lebrillet

Merci. De la part d'une qui sait assembler les mots cela fait bien plaisir. Amicalement.

pseudo : Chollet Mikael

Très joli conte poétique tout à fait digne de cette belle terre de légende qu'est la Bretagne. Bien écrit de plus, ce qui ne gâche rien.

pseudo : mike

j'ai rencontré andréa