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Saisons par Mancini Armelle

Saisons

Le jour se levait déjà sur le petit village endormi. Les corps se mouvaient paisiblement les uns contre les autres, habités par une calme respiration. Ils étaient encore chauds de la nuit déroulée, qui si tôt s'en irait avec leur paix apparente. Leurs muscles étaient délassés, ne tenant plus à rien. C'était un lâcher prise vers un inconnu rêveur. Telle la neige qui tombait par delà les montagnes, interceptant la lumière du soleil levant. L'astre orangé apportait sa chaleur hivernale, ce réconfort lointain du retour de l'été, cette promesse silencieuse. Les arbres nus mêlaient leurs branches, poussées passionnément par un vent frissonnant, elles se rencontraient au hasard; à la chance d'une nouvelle aube, elles s'enlaçaient. Les candides glaçons accrochés au bout de ces âmes prenaient vie, tintinnabulaient, s'entrechoquant dans de légers murmures, que la forêt gardait précieusement comme doux secret.
Le soleil était à présent à son apogée. L'être lumineux qu'il était, signifiait son omniprésence, réveillant les derniers retardataires, désireux de garder le berceau où ils créchaient. Ils s'accrochaient aux ultimes limbes du sommeil, persuadés que jamais cette sensation d'éclosion ne reviendrait. Les membres s'étiraient par enchantement, retrouvant leur mobilité naissante, ressemblant aux fleurs boutonnées qui déployaient leurs pétales. Au fond de la lointaine lande, s'étendaient d'autres merveilles insoupçonnées. La légère rosée était balayée par un vent tiède, concertant dans le beau temps, la journée commencée. La nonchalance régnait dans ce ciel émeraude, où les brins printaniers s'entrecroisaient sans hésitation ni démesure. Ils ne se lâchaient qu'aux bruissements infantiles et surprenants de la nature autour d'eux, comme un rappel à l'ordre, un avertissement; prouvant que le temps n'était pas impatient de voir la déchéance automnale revenir.
Le ciel étendait son bleu, profondément, sans fin, de manière à ne plus savoir d'où la clarté prenait puissance. Une chaleur presque étouffante dirigeait les individus. Ils étaient étalés, ne bougeant plus, fermant les yeux, laissant la langueur les envelopper. Un désir intermittent et impétueux flottait dans l'air moite, disparaissait dans un coin d'ombre trop envahissant, parfois sous un arbre qui se déployait encore dans ce mois d'août. La brise estivale ne se perdait que peu, ne se montrant pas. Il résistait dans les sous bois, des endroits, où, cependant, la beauté florale s'épanouissait dans la fraîcheur occasionnelle. Des ruisseaux couraient dans ceux-ci, à l'abris des regards; l'eau se ressourçait en amont et rapportait sa spontanéité, calme vivacité qui lissait les galets sur lesquelles elle filait. C'était une indécision car on ne savait si leur rencontre apporterait ardeur ou pudeur, ramenant ainsi le regain de l'automne.
Vingt heures tapantes semblaient sonner. Le firmament revêtait une robe très pâle et lointaine. Entre nous, nous nous serrions les uns les autres, pour chercher une épaule amicale, observant le levant se coucher. Nos yeux se perdaient vers l'étranger, devinant simplement un trait roux vers l'horizon, s'accordant aux feuilles prêtes à tomber. Certaines s'accrochaient désespérément aux branches décharnées, mais gardant vie, d'autres dégringolaient, semblant abandonner la partie. Les petits craquements composaient une musique agréable et éperdue. Les dégradés de couleur scintillaient au crépuscule, rappelaient au tendre souvenir d'une peau mate sur laquelle des mains auraient pu s'égarer. Il plut tout de même un silence lourd de sens, entre les gouttes, car l'été laissa place à la défloraison, tout en douceur, en confiance d'une année métamorphosée. Tout se fut passé si vite, que plus rien ne fut visible à part les quelques étoiles qui brillaient au coeur des cieux.

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Coup de cœur : 9 / Technique : 6

Commentaires :

pseudo : Mignardise 974

Très beau, décrit avec perfection, rien à redire ! brillant ! =D Merci infiniment du partage