J’guette à ma fenêtre la vie qui bavarde,
Les nouvelles du jour pour ceux qui s’attardent,
Un mec qui coure après son train
Trop pressé d’attraper son destin,
Et cette fille qu’on bouscule,
Timide corps qu’on désarticule,
Des amoureux qui s’aiment dans c‘vieux bistrot,
Qui se séduisent, qui s’apprivoisent à demi-mots,
Et ce vieux qui gueule à tue-tête,
Les souvenirs d’une époque qui se fait muette,
Et l‘autre, qui fume sa blonde,
Jeunesse esclave qu’on dévergonde
Des visages anonymes qui s’agitent,
Dans un concert de mimes qui s’invite,
J’guette à ma fenêtre la vie qui raconte,
Des vérités qui pourraient nous faire honte,
Des groupes qui refont le monde,
Un espoir qui s’dessine juste une seconde,
Une dispute à l’angle d’une allée sombre,
On n’entend rien, on discerne seulement une ombre,
Un enfant qui gambade, rire aux lèvres,
J’fais la paix avec moi-même, j’m’accorde une trêve,
Et les serveurs qui font du charme,
Sourires crispés dans ce vacarme,
Et les clients qui râlent par principe,
Pour exister on anticipe,
La pluie qui s’incruste comme un répit,
On entrevoit la folle danse des parapluies,
J’guette à ma fenêtre la vie qui chuchote,
De petits secrets en anecdotes,
L’orage est proche, comme un conflit dévoilé,
Et la foule qui se fige, s’abritant sous les porches martelés,
Les plus courageux qui défient la crise,
Juste pour se libérer d’une confortable emprise,
Et on s’entassent sous l’arrêt de bus,
Et on se sent moins seuls sous l’abribus,
Et les pavés qui s’habillent de reflets,
Menaçant les piétons qui s’y aventureraient,
Et les couples qui regarde par la fenêtre,
Se prélassant dans la douceur de l’être,
Des touristes avides de nouveaux clichés,
Patientent là, le regard blasé,
J’guette à ma fenêtre la vie qui murmure,
Ses exigences, entre nos murs.