Fiévreuse et agonisante, quelques notes de guitare qui s'égrainent dans le silence, elle sait qu'elle doit faire quelque chose, réagir, mais elle demeure passive. Elle a de nouveau les yeux noirs de colère, encore un air blafard, elle a les doigts a feu et a sang, elle tremble. Rageuse, fatiguée, elle lutte, lutte, ne cache pas sa fureur, ce qui bouillonne et la fait s'étrangler. Elle a tenté d'écrire, les taches d'encres parsèment la feuille, les mots n'ont pas de sens. Elle sent les esprits, elle hurle des questions, personne ne lui répond. Leurs yeux béats, leurs visages déformés par l'horreur de cette femme, son souffle coupé, ils s'échappent, ils ne veulent pas confronter cette réalité si différente à leur petit monde confortable et abrutissant. Elle porte des lambeaux, elle dégouline de sanglots, le râle dans son œsophage est empli d'un arôme brut. C'est sans fin, c'est continue, vicieux. Rien ni personne ne peux l'arrêter quand elle brûle de cette haine pure et qu'elle est indifférente a la manière dont elle se détruit ou elle défraîchie son âme. C'est tellement spontané, elle souhaiterait s'arracher le cœur, le regarder palpiter, voir le sang couler, tracer des mots, des phrases entières avec sa chair et son souffle de vie, elle voudrait pouvoir être sure de ne plus vivre, jamais, jamais, de ne plus être déçue, de ne plus attendre, elle gueule qu'elle maudit l'espoir, et si un jour, un jour, elle plonge la main au creux de sa poitrine, si elle arrache cet organe éprouvant, elle est persuadée, au plus profond de son être qu'elle continuera d'avancer, d'exister; elle ne se sent plus humaine, elle est bestiale, sauvage, elle peut tout analyser, tout entendre, tout voir, tout sentir, et c'est ça son moteur, sa bénédiction. Son coeur, elle le mangera, elle le déchirera de ses dents, son sang, il lui fera écrire enfin sa terreur et son âme ira en enfer. Mais elle continuera, elle continuera, d'avancer, jambes interminables et yeux noirs.
Faisant dévier son chemin, il l'a déchiré et il a fait d'elle une horreur.