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Lola par Pingzdar

Lola

Lola . Lolita. Ciao Bella. Pleins de mots à la con en italien lui venaient a chaque fois qu'il pensait à elle. Voglio amarti , toccarti , vederti. Pleins de clichés boueux qui lui salissaient les lèvres d'un rouge suave et dégoutant. Il aurait pu être numéro un des charts anglais cinq ou six ans consécutifs avec toutes les chansons qui lui sortaient de la tête. Mais elle , elle aimait pas ca. Non ça lui plaisait pas , à Lola. A Lolita. Belle comme un brin de lilas. Voilà que ça le reprenait. Un flot de conneries finissait par reprendre le dessus ,comme d'habitude. Les yeux en artichaut , le cœur comme un pamplemousse trop pressé.
Enfin , il y avait quand même un truc. Un truc foutrement bizarre. Pourquoi elle s'appelait Lola , si elle était pas une muse , une strega aux doigts vernis et crochus? Comment on pouvait porter un prénom pareil si on ne chantait pas l'amour a chaque coin de rue? Pas de sa faute , il était bien d'accord , ca avait du être ses parents qui lui avaient donné trop de tendresse d'un coup. Un uppercut au sortir du berceau. Ma petite , tu n'es pas encore rentrée dans la vie mais sache déjà que tu porteras un poids toute ta vie , tu t'appelleras Lola , Lolita pour tes copines ,tes amis. Lolo quand on se foutra gentiment de ta gueule.
Mais ton devoir , ma chérie , va de pair avec le nom dont nous t'avons affublé. Tu devras répandre l'amour sur Terre , donner a tes proches , les gens que tu rencontreras une petite étincelle de vie qui illuminera leur mornes existences. Voilà ce que lui avaient gentiment fait comprendre les paternels. Pas trop le choix en fait , ils lui avaient dit. Eh bon , comme il fallait bien compenser , ils lui avaient donné une belle composition.
Nom de dieu qu'elle était belle Lola. Bonne même qu'ils criaient en bas , dans la rue piétonne quand elle passait et Lola ca lui faisait plaisir , elle en rejetait ses reins encore plus en arrière. Belle comme un pain de sucre qui fond dans un bol de lait. Des yeux en amande , des cheveux plus noirs que le charbon le plus pur et une odeur , une odeur!! Quand il la suivait , ses narines se dilataient a en faire pâlir le plus chevronné des parfumeurs. Et puis elle avait beau être frêle , avec ses petites épaules toute menues et ses jambes sans fin , elle avait quand même un beau pétard. Un sacre pétard même , qu'il lui faisait exploser les yeux plus fort qu'un coup de grisou.
C'était surement pour qu'elle puisse inspirer confiance aux gens , qu'il l'avait si bien foutue , Apollon ou le vieux fou qui siégeait en haut a façonner des perles comme ca. Pour que , dès l'enfance , elle puisse savoir son pouvoir d'attraction et connaître au mieux le maniement de ses armes.
Et donc elle savait au mieux de quoi elle était capable maintenant. Elle pouvait faire tourner la tête aux bellâtres les mieux préparés en moins de temps qu'il n'en fallait a un paon en rut pour se pavaner et faire une roue. Elle avait fait plus de torticolis a ses semblables qu'une mouche sous guronzan n'en aurait fait a une colonie de grenouilles. Elle savait battre au mieux de l'œil pour distraire la lune un instant et lui voler sa pale lueur. Enfin , voilà qu'il s'y remettait. Mais c'était justement ca , le problème , cette foutue inspiration qu'elle injectait partout. A croire qu'elle avait des aiguilles a la place des yeux qui cherchaient les veines des poètes.
Elle avait trop d'atours et d'atouts qui inspiraient l'affection et elle prétendait s'en être désintéressée. Elle lui disait tout fort dans le métro devant les gens qui ricanaient qu'elle s'en foutait de ses violentes sirènes de l'amour. Qu'elle s'en balançait de ses mots doux. Qu'elle s'en tamponnait méchamment le chibre de ses poèmes exubérants. Et qu'elle préfèrerait encore se faire ramoner sauvagement par deux chauves dans une boite échangiste au cap d'Agde plutôt que de subir encore les entrelacs de ses regards. Le langage châtié n'avait pas été fourni dans son kit de princesse apparemment et il avait été profondément vexé. Pas tant par l'évocation salace de son pubis que par l'inconscience effrayante de son corps.

Alors , finalement il avait fini par tout lui dire. La fée cupidonne sur son lit , son destin et ce qu'elle avait a accomplir , tout ce qu'il lui restait a faire. Il lui avait expliqué , gentiment mais fermement , le pourquoi mais sans connaître le comment. Lola , il faut que tu m'apportes l'étincelle , le feu , la joie de vivre , tout ca. Tout ca grâce a toi , Lolita. C'était écrit. Pas par ma faute , ce sont tes parents qu'ils l'ont voulu. Tu peux me blâmer mais je n'y suis pour rien. C'est ainsi. Et donc , si je te suis , si je t'adore et te murmure la tendresse des choses a ton oreille sans arrêt , ce n'est pas parce que je suis amoureux. Oh non Lolita!! Non , pas le moins du monde. Je n'ai jamais même été amoureux. C'est pour ca que tu es la. Je l'ai su des que j'ai t'ai vu , avec tes grands yeux de chatte , ta bouche en cœur et tes cheveux que tu attaches comme un bouquet de sortilèges. C'est ton odeur qui me l'a dit. Et ton cul , ton petit pétard Lola , ces deux petites demi-lunes qui s'entrechoquent dans un rythme enflammé , ça c'est ta baguette magique.

La j'ai su qu'il fallait te suivre , ne jamais te perdre jusqu'à ce que tu exauces mon vœu, que tu me donnes ce que tu es destinée a délivrer a chacun de nous. L'Amour , oui mais celui avec un grand A. T'es l'incarnation d'Éros en personne Lola. Tu connais la mythologie Lola? Tu as lu le Banquet de Platon Lolita? Lis-le , tout y est expliqué. Le corps à son origine , les hommes mauvais , la punition de Zeus , et puis la séparation. Car il nous a coupé,Lola,tous autant que nous étions. Coupés en deux tchac , tchac tchac , il devait se faire chier la-haut le petit père et il a bien réfléchi au châtiment qu'on méritait pour avoir grimpé leur montagne , aux séniles. Alors il nous a séparé dans un accès de sadisme ou autre chose.
Mais il a fait ca bien , le vieux barbu. Pile-poil , hein attention , sur la ligne. Il voulait pas qu'on se retrouve tous comme des monstres en bas , des petits gros avec quatre oreilles et des grandes maigres sans un seul pied. Ça l'aurait emmerdé , après, tu comprends , carina Lola , de nous regarder depuis son petit nuage. Alors il s'est appliqué a faire ca bien. Mais il lui restait un petit souci. Bah oui forcément comme on avait tous des bites a l'origine , on pouvait plus se reproduire. Au début ca allait. On avait tous deux engins par personne , on comptait tous doubles , et même si ni Phedre ni Platon n'ont voulu m'expliquer comment on se débrouillait , je crois qu'on devine un peu , hein Lola. On se reproduisait quand même , en somme.
Mais après ca , quand on était tous coupés en deux , plus question de faire des choses comme ca , rhoooo non , il aurait pas pu nous regarder une fois de plus l'immortel singe des limbes. Donc il a créé les vagins , les chattes Lolita , moi aussi je peux te parler comme un rustre , et il les a foutu la ou étaient les pénis , pour la moitie d'entre nous. Tu peux oublier toutes les conneries d'Adam et de son rein , oui oui , les seuls coups de rein qu'il a jamais donné , c'était pas avec Ève , parce qu'il était pas encore coupé en ce temps-la .
Enfin je m'éternise , tu m'as compris Lolita , on est tous comme des moitiés. C'est pour ca qu'on se cherche tous un peu , dans ce bas monde , comme des bêtes a la recherche d'un bout de peau ou fourrer son museau pour une nuit. Mais ce qu'ils avaient oublié de dire dans leurs bouquins , Phedre et Platon , Socrate et les autres discoureurs de grande classe , même s'ils ont tous fait des éloges du petit mec plus balèzes les uns que les autres, c'est qu'Éros,hé bien il avait prévu son coup.
Parfaitement , oui , il avait compris le plan du grand vicieux du premier étage. Il savait qu'il essaierait de nous avoir a la ruse encore une fois , nous les pauvres humains. Et Éros , qu'était surement un peu énervé de pas être le Big Boss de l'Olympe alors qu'il était né avant le Zeus et même avant son paternel , le vieux Chronos , il a voulu nous filer un coup de main. Une revanche sur le système , grosso modo , c'était un révolutionnaire au service des petits peuples l'Éros, un Spartacus de la race humaine. Et puis , apparemment , il nous aimait bien un peu aussi , nous les autres d'en bas , même s'il savait probablement déjà qu'on pourrait pas lui servir a grand-chose si jamais il tentait de faire son putsch. Mais bon , il a du se dire allez je vais les aider quand même les petits bonshommes du rez de chaussée. Et c'est là , Lola , que tu débarques.
Tu vois , Lola , Éros , en petit futé qu'il était , il avait déjà prévu qu'on serait coupés en deux , nous les humains , et que , inéluctablement , on se retrouverait a chercher nos moitiés. Alors , au lieu d'essayer de nous recoller deux par deux ce qui était impossible vu qu'on était déjà devenus trop nombreux et que les chinois étaient trop difficiles a reconnaître comme toutes leurs moitiés se ressemblaient , il a décidé d'envoyer des guides. Pour nous aider a trouver nos hémistiches et refaire tous les beaux petits alexandrins qu'on est tous un peu. Parce que oui , en fait , Zeus l'aurait repéré en plus , s'il nous avait tous convoqués pour une séance de refonte générale et donc disperser des guides , des éclaireurs comme ca à travers la Terre , c'était bien plus malin.

Et c'est la que tu fais ton apparition Lola. Un archange tombé du ciel , une déesse dépêchée par Éros pour nous offrir le fruit d'une quête ultime , celle de nos moitiés. Tu ne le sais peut-être pas encore mais c'est la ta mission , la tache qui t'a été assignée , que tu en veuilles ou non. C'est pour cela que je te harcèle de mes assiduités langoureuses. Depuis la première fois ou mes yeux se sont posées sur ta crinière chatoyante et tes yeux qui suintent la romance de toute leurs cornées , j'ai su que tu me désignerais l'objet de mon affection a venir.
Mais j'ai eu beau me fourrer dans tes pattes et dresser l'oreille a toutes les silencieuses prières que ta bouche ne murmure pas , je n'ai pas trouvé ma moitié , celle que tes bas me promettaient. Alors , et tu connais mon acharnement quand j'ai une bille en tête , j'ai continue de te poursuivre mais plus je marchais dans tes traces , comme un limier flaire un faisan rosé bien juteux, moins je comprenais.

Parce que toi Lola , l'Amour tu t'en balances , tu ne le sens pas , il n'a même jamais existé pour toi ma Lolita. Tu vomissais des pleines bouches quand a coté de toi ca s'envoyait des petits messages qui fleurent la rose. Tu n'as jamais si bien débagoulé des grivoiseries scabreuses que lorsque sous ton nez deux amoureux se kidnappaient mutuellement la bouche a grand coups de langues sur les bancs publics , bancs publics. L'Amour , j'ai fini par l'admettre , ca te faisait chier , ma Lola. Rien que le son des piafs qui roucoulent dans les matins de tendresses ca t'exaspère , Lo , et tu leur jettes des pleines poignées de Xanax aux piafs , comme ça , en espérant qu'ils les gobent et qu'ils arrêtent de te faire chier.
Et pourtant , pourtant , ton petit cul toujours , Lola! Ton coups de reins a en faire pâlir les piliers de comptoir du PMU de la rue d'Hautpoul de pas avoir misé sur toi dans le dernier tiercé! Ta voix couleur chocolat noir , si noir que tu pourrais en faire bander un grizzly dans une grotte d'Alabama. Et tes yeux , pardon , tes obus , si grands et effrayants qu'ils auraient pu arrêter l'invasion de la Pologne en 1938 si les chars nazis avaient pu les voir… Tout ca , ma Lolita , ca fouette l'amour , ca transpire le printemps du soir au matin et mon cœur était qu'une peau de chagrin de constater que tu le savais même pas.
Des fois même , je me disais , qu'il faudrait que j'arrive à créer un costume en miroir tout autour de toi, une vaste tulle en verre réfléchissant qui t'aurait renvoyé ton reflet. Et puis je t'aurai mis des œillères , comme pour les juments tu sais , et tu n'aurais rien pu faire sinon être forcée a te regarder sans cesse. Et la , j'étais convaincu ,quand je faisais les maquettes de cette géniale tunique dans mon minuscule bureau en pensant a toi , tout le temps , là j'étais convaincu que tu finirais par tomber amoureuse de toi-même a force de te loucher dessus tout le temps et qu'alors tu découvrirais l'Amour. Et même alors , peut-être Éros , il me remercierait de l'avoir aidé , et au lieu de juste une moitiés , et bien , tu sais , il m'en donnerait deux , ou trois , parce que les dieux , en tout cas les gréco-romains , ils ont jamais interdit la polygamie , non non , même qu'ils la conseillaient , parait-il , comme une ouverture d'esprit.
Mais mon drame , Lola , c'est de pas être Saint-Laurent ou Lagerfeld ou Heidi Slimane parce que j'ai eu beau faire des centaines de croquis de la robe ,je ne suis jamais arrivé a la réaliser. Les petits morceaux de miroir finissaient toujours pas tomber et puis , faut que je te dise , j'ai jamais réussi a faire le contour des seins , tes seins beaux comme des natures mortes chez Gauguin… Et comme j'avais pas assez d'argent pour recommencer , j'ai du arrêter d'essayer au bout du huitième essai. J'aurais bien voulu te le faire ton costume de super-héros , Lolita , un déguisement de Super-Lola qui t'aurait donné un aperçu de l'amour avant que tu n'ailles le répandre partout. Si j'avais été Bruce Wayne au lieu de Peter Parker , j'aurais pu demander a Alfred de me le fabriquer mais bon , j'habite ni a New York ni a Gotham City.
Donc , comme d'habitude , j'ai fini par retourner le projet dans ma tête , a l'envers , a l'endroit , a l'endroit , a l'envers comme avait chanté Bertrand. Et puis , tchouff , comme ça des fois , il y a un fusible qui décide de se rallumer de lui-même , j'ai compris. J'ai compris , Lolita , que c'était toi que je devais aimer. Si Éros ne m'avait pas montré la voie a travers tes pas , c'est qu'il voulait que je te montre la voie pour que tu suives ses pas. Un peu compliqué , mais bon tout ça débouchait sur le fait que moi , je devais t'aimer , et que toi , a force de recevoir tu finirais par voir le destin qui t'avait été tracée. Voilà , ma Lola , pourquoi tu dois ne plus me résister mais bien t'abandonner toute entière a moi et tu finiras par comprendre l'Amour. Et ne blâme pas , Lolita , tu le sais maintenant , ce n'est que le choix d'un être bien plus puissant que nous deux réunis , c'est la décision du Dieu de l'Amour.

Mais Lola , elle ne l'avait pas entendu de cette oreille , ce petit discours. Et elle lui dit , tout net , que c'était la technique de drague la plus naze qu'elle avait jamais entendu et que de toute façon , après avoir entendu des âneries pareilles , elle préfèrerait encore aller se prostituer sur le canal avec des sans-papiers sidaiques que de le toucher .Elle lui dit que son discours , hé bien , il affleurait le foutre , mais sans jamais le mentionner , et que elle , c'était ce qu'elle préférait le foutre , en tout cas elle le préférait a cette saleté d'amour qu'il lui donnait sans cesse. Elle pouvait pas, Lola , elle lui disait, sentir tous ces sentiments pleins d'odeurs de santal et de lavande lui monter a la gorge comme ca. Elle finirait par en vomir , de ces conneries. Peut-être , quand même elle lui disait , quand elle serait vieille et décrépie , alors la , peut-être , il pourrait se passer quelque chose. Elle envisagerait alors de se laisser prendre par le bras l'espace d'un après-midi au soleil dans une maison de retraite avant de le voir crever et d'aller hurler sur sa tombe avec une robe et un voile noir. Elle avait toujours trouve ca classe , qu'elle lui disait , les enterrements a la sicilienne ,et que ,comme elle était pas si chienne que ca ,elle lui ferait un enterrement comme au pays , elle crierait , elle hurlerait et déchirerait ses vêtements et elle se jetterait sur son cercueil, tout ca pour lui. C'était un beau prix de consolation , il ne trouvait pas ?
Mais non , il ne trouvait pas , mais alors pas du tout que ce soit une consolation de s'imaginer déjà crevé avec elle sur sa tombe , il aurait quand même préféré l'avoir un peu vivante et en profiter. Mais Lola , elle lui disait que c'était trop tard , que toutes ses conneries sur Éros et tutti quanti , ca avait fini par lui bouffer le cerveau , a elle , et qu'il demeurerait un indécrottable sentimentaliste a ses yeux et qu'elle avait pas l'intention de se faire mettre en laisse si jeune , ni même vieille d'ailleurs.

Mais il n'écoutait plus , il imaginait déjà , pour une raison obscure , Lola se prostituant devant le parvis d'une vieille église romaine , dans un quartier populaire. Il la voyait , sa silhouette féconde se découpant dans la lumière sépulcrale d'un Avril italien, aguichant d'une dentelle noire les chrétiens cherchant a franchir la lourde porte de la paroisse pour aller s'y recueillir. Il apercevait surtout son rosaire , un rosaire magnifique , le rosaire de Lola , un long enchainement de perles opaques et brillantes enfilées sur un superbe fil argenté. Un rosaire si beau qu'il ne pouvait être pieux. Et les passants , avançant sentencieusement vers la Chiesa dans la fraicheur de ce vendredi soir , la regardaient et fixaient de leurs bouches avides ce rosaire. Et il voyait quelques romains s'arrêter , lui demander quel prix il leur faudrait payer pour toucher ce rosaire qui se déployait , tel un boa , sur cette immense gorge nue. Et Lola riait , et leur chuchotait des mots salaces a l'oreille , n'évoquant rien de moins que l'image d'une pècheresse damnée dans le clair-obscur de la soirée. Et , nains charbonneux emmitouflés dans l'ombre de cette immense église , les petits catholiques s'en allaient , rougissant de plaisir , l'esprit et les sens déjà perdus , affolés par une adresse , une porte cochère a laquelle ils viendraient taper plus tard y rejoindre la délicieuse Lola.

Quand il rouvrit les yeux , Lola était toujours devant lui , démontant sans vergogne les arguments qu'il avait mis des heures a préparer. Si belle , comme toujours ,ses lèvres s'ouvrant dans un tango de plaisir , rouges sanglantes , d'où découlaient les mots comme de petites pointes d'albâtre qui chacune s'enfonçait en son cœur.
C'est la que ses yeux eurent le malheur de rencontrer le rosaire de Lola , sorti de cette hallucination éveillée. Elle le portait toujours , il l'avait toujours vu protéger les belles veines du cou de Lola , qui se gonflaient et palpitaient au fur et à mesure qu'elle parlait ou respirait , son visage s'empourprant. Et tout le paradoxe de ce rosaire lui éclata de plein fouet au visage , symbole de tout cet amour catholique qu'elle abhorrait. Lola , il lui dit , pourquoi ce rosaire? Pourquoi arbores-tu cet insigne d'une philosophie que tu hais Lolita ?
Mais Lola n'eut jamais le temps de répondre a cette question , dont il connaissait déjà la réponse de toute façon. Ses mains avaient déjà empoigné le rosaire de Lola et serraient son cou adoré. Et c'est le rose , la couleur de l'amour , qui envahit le visage d'ange de Lola , un si beau visage Dio mio , comme son étreinte se faisait déjà plus ferme. Les biceps se contractaient encore un peu et ce fut le tour du rouge , couleur de la passion , de prendre possession de Lola , de son cou si blanc d'habitude , si doucereux.
Enfin , Lola se laissa aller de tout son corps et la vie quitta ses yeux , sa bouche , son nez musqué et même son cul , son cul magnifique.

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