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Titre: appendicite (ou comment j'ai rencontré mon autre moi) par yannvti

Titre: appendicite (ou comment j'ai rencontré mon autre moi)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  Est-il nécessaire de dire qu'au début je ne me souvenais ni d'où je venais, ni de qui j'était ? Avais-je seulement un jour été quelqu'un ? Je ne me rappelais cependant que de deux chose : Le dégoût, et le goût du sang. Jamais je me risquais d'en parler. «  Raconte moi comment tu a rencontré ton autre toi ! » M'a tu ordonné. Ecrit donc :

           Je me suis réveillé dans la puanteur d'une cave aux murs épais et froids. En fait, j'ai d'abord été réveillé par l'odeur de la pisse, puis réveillé de nouveau par cette odeur si particulière aux caves. A croire qu'il était possible que je me réveille deux fois en si peu de temps.

 Les pierres tranchantes piquaient mon dos, et mes jambes étaient pleine de poussière. On aurait dit qu'elle formait sur ma peau comme d'étranges peintures de guerre. J'en avais aussi sur le torse, peut être en avais-je sur le visage. Dans un premier temps, je fus heureux d'avoir un short.

 Je me suis mis à chercher la lumière du soleil, à tâtons de mes yeux noirs. Je cru l'apercevoir, c'était un long fil de poussière lumineuse qui semblait filtrer à travers deux pierres grises. Je n'était pourtant pas certain que ce fut une lumière naturelle.

J'ai froncé les sourcils en me demandant comment, bon dieu, j'étais arrivé là.

 Je me suis levé, je me suis épousseté. Je donnais avec ma main de petites claques sur mes jambes, mon ventre et mon visage. Si je n'avait pas été noir, j'aurai pu croire que c'était des morceaux de ma peau qui s'envolaient en d'autant de petit nuages blanchâtres.

 J'ai voulu inspecter les lieux. Quatre fois je me suis retourné, quatre fois je me suis cogné contres ces murs tranchants. J'ai soupiré : Il n'y avait pas de porte. Heureusement, me dis-je, il y avait sous mes pieds nus un sol.

 Mais bon dieu de bon dieu, il n'y avait pas de plafond.

 Alors j'ai crié quelque chose comme « A l'aide » (ou bien était-ce « Au secours »). Ma voix se cogna aux quatre parois de la cave et revint à mes oreilles dans un écho violent. Au début, j'ai même mis mes mains devant mon visage. Puis je me suis dit que cet écho était inoffensif, alors j'ai rit de ma propre bêtise.

 J'ai remarqué quelque chose que je n'avait pas vu a mon réveil : C'était une petite lumière à peine perceptible qui clignotait tout la haut, dans le fond du plafond qui n'en était pas un.

 Je la regardais depuis plusieurs heures déjà. J'apprenais le rythme de son clignotement, calquait mes pensées ces derniers ( à vrai dire, je ne pensait que les premières heures) j'essayait de juger de sa distance, cherchait à lui donnait du sens.

 A un moment j'ai eu l'impression que c'était elle qui cherchait à juger de ma distance, que c'était elle qui cherchait à me donner du sens.

Ce n'était pas la première fois que, lorsque je regardais longuement quelque chose, je finissait par avoir l'impression que c'était cette chose qui se mettait à me scruter. Et j'avais horreur de cela.

 J'eu alors l'idée, puisqu'il n'y avait pas de plafond, de me mettre à escalader le mur. J'ai saisi l'une des pierres, j'ai pris mon élan, et j'ai sauté pour me saisir d'une autre pierre un peu plus haute. Les pierres étaient glissantes, peut-être étaient-ce mes mains qui étaient trop moites, n'empêche que je suis tombé. J'ai de nouveau du chasser la poussière, j'en avais cette fois-ce jusque dans mes narines.

 Alors j'ai eu l'idée d'étendre les bras et les jambes, de les appuyer le plus fort possible contre les murs et de grimper ainsi contre la paroi. Ce n'était pas confortable, mais j'arrivais à gravir, en plusieurs minutes, quelques centimètres a peine. J'ai grimpé pendant trois jours je crois, mais enfermé dans cette cave, je dois l'avouer, j'avais perdu toute notion du temps.

 Le deuxième jour, j'ai éprouvé un sentiment étrange.  Je ne savais pas si ce sentiment venait de l'état de fatigue dans lequel j'était à ce moment là plongé ou du sang qui sans arrêt coulait de mes mains et de mes pieds. Je n'avais plus la certitude, comme je l'avais eu au début, de monter.

Je croyais, j'en étais presque sur, que je descendais.

 Au début de mon escalade, j'en étais persuadé,  j'allais vers le haut. Désormais, plus les jours passaient, plus mes jambes ne tiraient plus mon corps, mais le poussait.

Raison de plus pour que je redouble d'efforts.

 Le troisième jours, mon sentiment de la veille se confirma enfin. Effectivement, j'avais la tête en bas, et la lumière qui clignotait toujours semblait vouloir m'indiquer l'endroit exact de ma chute. J'ai souri de voir que la réalité n'était finalement qu'une question de point de vue. Mon rire restait cependant celui d'un homme gêné.

A la fin du troisième jour je suis tombé de fatigue, au sens propre du terme.

 Je me suis réveillé dans la puanteur d'une cave aux murs épais et froids, mais c'était cette-fois ci de l'autre coté.

Et lorsque j'ouvris les yeux, je me vis debout au milieu de la cave. J'avais dans mes mains une lampe et je regardait le trou béant d'un plafond invisible et noir, et je l'éclairais. J'allumais la lampe, j'attendais, je l'éteignait, j'attendais, j'allumais la lampe, j'attendais...

 « -C'est bon, ai-je dis a mon autre moi, je suis là. » Il se retourna pour me regarder et me fit remarquer que mon short était couvert de pisse. Je me mit a lui expliquer, dans les détails, comment pendant ces trois jours j'avais du ne pas bouger ni relâcher mes efforts sous peine de tomber, ou, précisais-je, de m'envoler. Car, lui dis-je, je ne savais plus très bien désormais où étais le haut et où était le bas. Il sembla s'amuser de mon ignorance.

 Je lui fit remarquer qu'il était nu, il ne semblait pas l'avoir remarqué. Je lui demanda alors s'il était moi. Il me répondit poliment qu'il ne pensait pas être moi. A ma question « qui est tu alors » il me répondit pourtant  « je suis moi ». Moi aussi j'était pourtant moi et donc, pas conséquent, j'était peut être lui, concluais ai-je. Il répéta simplement d'une voix lasse que lui il était lui, que c'était évident.

 C'est ainsi que je rencontrait, dans ce monde pour le moins étrange, mon premier ami. Sa présence avait quelque chose de rassurant, même si au fond je le soupçonnais souvent de n'être qu'un rêve. Comme ce sol, comme ces murs, et comme ce plafond qui n'en était pas un et que je m'était mis a détester.

 Quelques jours plus tard, alors que je léchais une pierre afin d'étancher une soif féroce, il me demanda de lui raconter ma vie. Mais, me dit-il, pas comme on se la raconterais dehors, ici, ajouta t-il, le temps est a toi et il est a moi. Raconte moi ta vie , de ta plus tendre enfance, à ce moment même où tu léchais cette pierre humide. J'inventais.

               Quelque jours plus tard, alors que nous nous amusions à graver a l'aide d'une pierre nos prénoms sur nos mus respectif (j'avais le mur de droite) je lui développait ma théorie selon laquelle nous avions été enfermé en fonction de notre ressemblance physique. Si ce point me semblait toujours aussi évident, je fus déçu de constater qu'il ne l'était toujours pas pour lui. En fait, je crois aujourd'hui que cette théorie avait surtout pour fonction de me rassurer.

 Quelque jours plus tard, alors que nous discutions de notre avenir dans ce trou a rat, j'eus l'idée que nous nous mettions a creuser un trou dans le mur afin de nous échapper. Puisque le temps est a toi et qu'il est a moi, lui dis-je, nous devrions le dépenser en actes non plus en paroles. Il sembla apprécier mon entrain.

C'est a partir de ce jour, après d'interminables et longues heures d'ennuis que nous nous mimes a creuser. Nous nous aidions de petits morceaux de ferraille que nous avions réussit à démonter de la lampe et des quelques pierres tranchantes qu'au fil du temps, nous réussîmes a détacher.

 Je choisi volontairement de taire certains détails, de ne pas raconter comment, après un an de travails acharné, nous avions réussit a creuser un trou assez grand pour qu'au moins l'un de nous puisse s'y couché. Je ne te raconterai, tu l'aura deviné, que ce qui me semble nécessaire pour que tu comprenne comment un jour, sortit de cette cave puante, j'ai rencontré mon autre moi.

 Il y a eu ce jour où j'était à plat ventre en train de creuser, mon ami m'attendait dans la cave, il chantait. Moi je ne pouvais pas chanter car je devait souvent recracher la poussière que j'avalais en grande quantité. A un moment, alors que je sentait mes forces s'évanouir, j'ai senti que nous étions enfin  près de notre but. J'avait en effet creusé un petit trou d'où je sentait s'échapper un léger filet d'air.

 J'en fut tellement effrayé que j'ai du faire demi-tour en rampant pour prévenir mon ami de fortune.

 Il rampa à son tour dans le trou, pierre en main. Il creusa ainsi toute la journée et toute la nuit. Au petit matin (j'appelle petit-matin ce moment de la journée ou je me réveillais) il me secoua pour me dire que nous pouvions enfin sortir d'ici. J'étais persuadé que cet endroit ne me manquerais jamais, mais ne dit-on pas que l'on se met à aimer un endroit à la seule condition qu'on l'ait un jour quitté ? Caves puantes comprises, je le préférait même à ton ventre trop serré et trop sombre.

 En sortant du trou nous t'avons vu assise sur ce toilette. Je fus surpris de l'épaisseur de tes lèvres, puis par la grosseur de tes seins, puis plus tard dans mon histoire, lorsque tu te lèvera, je fus surpris par la largeur de tes fesses. Mon ami était devant toi, et il riait de ce que tu semblait à la fois paniquée mais apparemment trop occupée pour pouvoir bouger. Nous avait-tu vu ?

 Tu était, m'a t-il semblé, enceinte, et j'avais peur que tu fasse tomber ce pauvre enfant tellement  tu poussait fort en grimaçant. Moi je ne voulais pas t'effrayer. Je crois qu'au fond, j'ai tout de suite su que je deviendrait  ton enfant.

 Ainsi, j'ai quitté ce même jour mon ami de fortune. En fait, il avait suffit qu'a un moment je me retourne pour le voir disparaître a tout jamais. Je t'ai donc suivit, j'attendais le moment ou tu relâcherait ta vigilance afin que je puisse enfin m'enfiler dans ton ventre gonflé. J'avais besoin de ce corps neuf.

 Tu ne me voyais que certains soir, dans tes rêves, mais je doute que tu t'en souvienne aujourd'hui. Tu te souvient sûrement lorsque je donnais des coup de poing pour sortir de ton satané ventre et que tu t'écrirai toute contente et toute fière « il a bougé ! ».

Bien sur que je bougeait, je ne faisait que ça.

 Peux tu demander a ce type d'arrêter  de s'agiter ? Regarde le qui bave et qui roule ses grand yeux noirs en se donnant des airs de grand sorcier.

 Demande lui de s'arrêter de se lever pour jeter sur mon corps des herbes et des liquides.

Demande lui plutôt de se rasseoir pour qu'on finisse d'écrire cette foute histoire, j'ai un travail a terminer moi. Et tu dois t'en douter, ce monde n'est pas le mien.

Retiens donc un peu le corps épileptique de ton fils, lorsqu'il bouge comme cela, j'ai du mal a me concentrer.

 Quoi monsieur ? Qui j'étais dans mon autre vie ? Monsieur, dans mon ancienne vie j'était un tueur réputé, monsieur. J'ai tué, monsieur,  au nom de l'amour. Et si vous me le permettez, j'aimerais bien finir le plus tôt possible cette bien étrange histoire !

 J'allais donc dire, dans l'un de tes rêves, j'avais pris la forme d'un poisson aux écailles lumineuses. J'avais construit dans tes pensées une petite rivière aux courants frais et rapides. Tu t'y baignait nue, tu n'étais pas gênée par ton ventre encombrant.

Tu t'amusais à passer tes mains dans l'eau de la rivière et à les passer sur ton visage. Et moi, sous l'eau, je t'observais. Puis tu t'est mise à t'agiter, puis tu pris dans tes mains des poignées d'eau fraîche de plus en plus grosses, puis tu les balançais sur ton visage, puis tu riait, puis tu recommençais.

 Alors je me suis déposé dans le creux de l'une de tes mains en agitant mon petit corps de poisson rouge, et je riais aussi a pleine dent qu'enfin tu m'attrape, et je riais aussi de ce tour imaginaire que je t'avais joué.

Alors j'ai sauté dans ta bouche ouverte de surprise, et toi tu t'étouffait pendant que je m'amusais a cogner dans ton intestin, que je chatouillait ton foie, que je mordillais ta rate, que je remontait dans tes poumons et que je redescendait dans ta vessie.

Tu aurait du, a ce moment la, comprendre que ton enfant ne serait plus jamais le tien.

 Crois tu que c'est par hasard qu'avant même de savoir prononcer la moindre phrase, le moindre verbe, le moindre pronom personnel sujet, crois tu que c'est par hasard que nous lisions déjà pendant des nuits entière des traités de médecine pour débutant et des histoires d'un autre temps, comme celle d'un homme qui tue au nom de la science en Angleterre, comme celle d'un homme qui paye le châtiment de ses crimes en Russie, comme celle d'un homme qui croit voir des esprits dans son châteaux en France, comme celle d'un homme qui était mort pour l'amour d'une femme en Italie, comme moi ? Et toi de t'écrier toute contente et toute fière « Nom d'un chien, c'est un génie ! »

 Ainsi le jour de la naissance de ton rejeton, nous ne formions déjà qu'une seule et même personne, jusqu'à ce que ce sorcier de malheur, jusqu'à ce que cet artiste de foire, jusqu'à ce que ce comédien,  vienne me dédoubler de mon propre corps pour que je te raconte cette histoire que tu entend de la bouche de ton enfant et que je te force même à écrire sur ces feuilles toutes sales. Le voilà donc qu'il veut entendre mon histoire maintenant ! Me prend tu pour un imbécile, je sais que lorsque tu saura qui je suis, tu ne pourra que mieux me renvoyer d'où je viens.

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Style : Nouvelle | Par yannvti | Voir tous ses textes | Visite : 850

Coup de cœur : 9 / Technique : 9

Commentaires :

pseudo : monalisa

Bienvenu Yannvti dans l'univers des métaphores, des mots bien dit là ou il faut. Tu as une imagination débordante pour écrire une telle histoire, bravo et bonne continuation.