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A ce moment-là, je su que ma vie était à présent terminée. par cindy

A ce moment-là, je su que ma vie était à présent terminée.

Apparemment, la fête était réussie. Les gens avaient raison, j’étais vraiment douée pour organiser des fêtes en tous genres. L’ambiance était géniale, la musique était parfaite, les pas de toutes ces personnes, connues et inconnues, résonnaient sur la piste de dance. C’était d’ailleurs grâce à eux, grâce à toutes ces personnes qui m’encourageaient et me soutenaient que j’avais trouvé ma voie.

Ce soir, c’était ma fête. On célébrait ma naissance vingt ans plus tôt. Malgré le fait que nous ayons terminé le lycée il y a de cela deux ans, j’étais heureuse de constater que toutes les personnes que j’aimais et chérissais répondaient encore présent à chaque fois que je les appelais pour une quelconque raison. Tous mes amis les plus chers étaient ici ce soir, et je les remerciais d’avoir toujours été là pour me soutenir et d’être toujours à mes côtés maintenant.

Pour cette nuit, ma mère m’avait laissé sa grande maison avec son jardin. Après tout, on ne fête ses vingt ans qu’une seule fois dans sa vie.

En parlant de vie, je devais dire que je n’avais pas à me plaindre de la mienne. Je vivais avec ma mère, Allyson et son nouveau mari, Phil. Tous deux tentaient de faire tout leur possible pour me rendre heureuse. On peut dire que j’étais comblée. Seulement, il me manquait quelque chose, et ce manque me transperçait le cœur un peu plus chaque jour qui passait. Ce quelque chose, c’était mon père. Il nous avait abandonnées ma mère et moi alors que je n’avais que sept ans. J’étais encore très jeune, mais mon esprit avait tout de même réussi à enfouir au plus profond de mon être des tonnes de souvenirs dont il faisait partie Seulement, il s’en était allé parce qu’il se disait trop jeune pour être marié et avoir un enfant. Certes, ils m’avaient eu alors qu’ils n’avaient que dix-sept ans chacun. Mais il avait tout de même mis sept ans pour se rendre compte de cette absurdité. Il a gâché sept années de ma vie, sept années où j’avais eu la chance d’avoir des parents qui s’aimaient et qui m’aimaient. Et puis, comme ça, du jour au lendemain, je ne l’avais plus revu. Il s’était littéralement évanoui dans la nature.

Je regardai un peu les gens alentours, et me rendis compte que beaucoup des personnes présentes m’étaient totalement inconnues. Je ne m’en inquiétai cependant pas plus, c’était tout le temps comme ça par ici. Lorsqu’une fête s’organisait, les amis invités invitaient leurs amis qui invitaient eux-mêmes leurs amis. Au final, alors qu’une cinquantaine de personnes étaient prévues, il y en avait le triple en plus.

Je m’enfonçai un peu plus dans la foule afin d’aller me servir un verre, lorsque non loin de moi, j’entendis deux filles qui parlaient apparemment de moi :

« Non mais regarde-la ! Regarde comment elle s’est habillée, comment elle marche et comment elle se tient !

- Non mais laisse tomber ! Sous prétexte que c’est son anniversaire et que c‘est elle qui a tout organisé, elle fait tout pour faire son intéressante. Et puis tu as vu comment elle s’est maquillée ? Elle aurait dut en mettre un peu plus, tu sais !

- Punaise, tu as raison ! Pff, ça m’énerve les filles comme ça !

- Ouais, et puis t’as vu… »

Je préférai me boucher les oreilles et détourner mon regard d’elles plutôt que d’entendre le ramassis de méchancetés qu’elles s’apprêtaient encore à dire sur moi. Alors là, c’était vraiment l’apothéose. Pour qui se prenaient-elles ? Je ne les connaissais même pas et ne les avais jamais vues de ma vie ! Comment pouvaient-elles dire des choses aussi monstrueuses sur moi ?

Je m’en allai un peu plus loin en leur jetant un regard empli de méchanceté avant d’apercevoir un visage amical. Je me dirigeai vers elle, et lui dit :

« Cassy, tu les connais les deux filles, là-bas ?

- Hein ? Quoi ? Oh ! Heu… Non, pourquoi ?

- Il y a deux minutes, je suis allée me chercher à boire et je les ai entendues dire des méchancetés sur moi…

- Heu… Ecoute, on en reparle tout à l’heure, d’accord ? Je suis assez occupée, là… »

Et elle me tourna le dos, se mettant face à un charmant jeune homme. Décidément, la soirée se passait bien pour tout le monde, sauf pour moi. Tous aimaient la musique et l’ambiance, tous parlaient et riaient à droite et à gauche, tous draguaient… Et moi, alors que c’était ma fête, alors que c’était mon anniversaire, j’étais là, seule, dans mon monde, en train de me ressasser le passé alors que ce n’était pourtant pas le bon jour.

En réalité, et en y repensant bien, je pensais que je n’étais pas aussi heureuse que je le prétendais, et que je me cachais derrière un masque. Son abandon m’avait littéralement gâché la vie, et je ne sais pas si un jour je pourrai m’en remettre. J’y pensais tous les jours, et je n’arrivais pas à enlever de mon esprit cette image de ma mère en pleurs en train de le chercher de partout, même dans les endroits les plus improbables tels quand dans des placards à balais. Il me manquait tellement. Mais en même temps, en réfléchissant, qui était-il ? Depuis qu’il était parti, je n’avais eu absolument aucune nouvelle de lui. Il ne m’avait jamais appelée, ni envoyé une seule carte postale pour mon anniversaire ou pour Noël. Le nouveau mari de ma mère avait tout fait pour le remplacer, mais on ne remplace jamais un parent. Il est impossible de créer un substitut de l’un d‘eux.

Essayant de ne plus penser à ceci, je tournai la tête vers l’entrée car j’avais vu une ombre entrer par la porte. Un homme d’âge assez mûr s’y trouvait. Etant donné qu’il n’y avait que de jeunes personnes, je me demandai ce qu’il faisait ici et entrepris de m’avancer vers lui afin de le lui demander. Sait-on jamais, peut-être un voisin s’était-il plaint du bruit que nous faisions, et peut-être ce monsieur était-il un policier ? Je le rejoignis en essayant de me frayer un passage à travers la foule de plus en plus dense, et remarquai que, si c’était un policier, il ne portait pas d’uniforme.

« Bonsoir. Vous êtes un voisin ? Je suis vraiment désolée du bruit que nous faisons, mais je fête mes vingt ans ce soir, et, par politesse, j’avais déposé un mot d’excuse dans toutes les boîtes à lettres alentours, mais peut-être que j’ai oublié la vôtre ou bien que…

- Bonsoir, Haley…

- Heu… Bonsoir, mais, comment savez-vous comment je m’appelle ? »

Soudain, un souvenir s’empara de moi, me laissant sans voix. Je le revoyais, treize ans plus tôt, en train de jouer avec moi. Je me voyais courir à travers tout l’appartement de ma mère, mon père à mes trousses en essayant de m’attraper pour me chatouiller. Nous étions tous deux en train de rire.

« Papa… ?

- Oui, c’est moi, Haley… »

A cet instant-là, plusieurs sentiments m’envahirent. Joie, bonheur, bien-être, ravissement, colère, haine, dégoût, fureur. Tous se mélangèrent, et je ne savais plus quoi penser. Une partie de moi souhaitait me voir lui sauter dans les bras, tout lui pardonner après treize ans, et recommencer une nouvelle vie dans laquelle il pourrait tenir une grande place. Mais une autre voulait que je lui saute au cou pour l’égorger, le rouer de coups et lui faire payer ce qu’il m’avait fait endurer pendant tant d’années. Cette dernière l’emporta, et dans un élan de rage, je lui dis :

« Dégage.

- Pardon ? me répondit-il, un sourcil levé d’étonnement.

- J’ai dit : dégage.

- Mais enfin, Haley, tu ne peux pas me dire une chose pareille. Je suis ton père, je suis là maintenant, prêt à réparer toutes les erreurs commises des années plus tôt.

- Toutes les erreurs ? Tu ne te rends compte de tes erreurs que maintenant ? Tu as mis sept ans pour te rendre compte que j’étais une erreur, et treize pour te rendre compte que tu avais fais une autre erreur en nous abandonnant, maman et moi ? Tu en as mis, du temps !

- Je sais bien, et c’est d’ailleurs pour cela que je reviens aujourd’hui. 

- Eh bien tu tombes mal.

- Mais… Pourquoi ?

- Ne cherche pas à comprendre pourquoi. Je t’ai dit de dégager, alors maintenant, fais ce que je te dis ! lui hurlais-je dessus. »

Je lui tournai le dos, et marchai en direction de cette foule de personnes que je ne semblais plus connaître à cet instant. Je vis quelqu’un s’approcher de moi et me retenir par le bras. Alan.

« Haley, ça ne va pas ? Tu as l’air toute chamboulée… Je t’ai vue te disputer avec le gars, là-bas… Tu vas bien ?

- Laisse-moi tranquille, Alan, dis-je en repoussant sa main. »

Il me regarda m’éloigner tandis que je me précipitai et montai dans la chambre de ma mère. Je savais que dans le tiroir de sa table de chevet, elle avait une arme à feu, un 9mm. Je réussis à trouver sa clé, prit le revolver, et je le cachai sous ma robe soigneusement choisie pour l’occasion. Puis je redescendis quelques minutes plus tard, mine de rien. Alan revînt à la charge, mais je lui faisais comprendre par un de mes sourires les plus beaux et les plus resplendissants que tout allait bien, et qu’il n’avait pas à s’en faire. Il me regarda, inquiet, puis me laissa partir.

Je me dirigeai à présent vers la porte d’entrée afin de sortir pour pouvoir le rejoindre. Je me doutai qu’il ne devait pas marcher bien vite, certainement assommé par la haine qui avait accompagné mes gestes et paroles. Et je n’avais pas tort. Il était là, à quelques dizaines de mètres de moi. Je m’arrêtai et l’appelai. « Papa ! » Il stoppa sa marche lente, se retourna, et me regarda un sourire aux lèvres. S’il savait ce qui l’attendait… Il s’approcha de moi d’un pas hésitant, et je fis de même. La seule différence entre lui et moi en ce moment-même fut le fait que, contrairement à lui, je savais exactement ce que je devais faire.

Dans la maison, la fête continuait à battre son plein, personne n’avait remarqué mon absence, et, si c’était le cas, personne ne s’en inquiétait. Tous étaient bien trop occupés à mener leurs petites vies insignifiantes, croyant qu’ils étaient capables de refaire le monde en une soirée et en étant imbibés d’alcool.

Lorsqu’il ne fut qu’à quelques mètres de moi, il ne bougea plus, et me fixa de son regard à la fois empli de bonheur et d’incertitude. Je le regardai, un mélange de tristesse et de haine s’emparant petit à petit de moi. « Papa, si tu savais comme je suis… » Je sortis l’arme de sous ma robe, et la pointai vers lui. « … désolée. » Je vis de la peur dans ses yeux. Il était effrayé. Et il avait bien raison.

« Haley, qu’est-ce que tu fais… ?

- Ce que j’aurais dut faire il y a de ça bien longtemps, Papa, lui répondis-je en insistant bien sur le dernier mot.

- Haley, tu ne peux pas… »

A ce moment-là, je su que ma vie était à présent terminée. J’avais enduré trop de souffrances tout au long de ma courte vie, et son retour ne faisait qu’empirer les choses. Je rabaissai l’arme de ma mère. Je pu voir que le soulagement s’emparait de lui, et tous ses muscles se détendirent. Mais il eut à peine le temps de crier « Haley, non ! » qu’en une fraction de seconde, je remontai l’arme vers moi et l’appuyai contre ma tempe, avant de tirer.

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