§ 1

Le verbe aimer ne peut se conjuguer qu’à la première personne du singulier, pour les autres, on ne peut savoir s’ils aiment ou pas.

§ 2

Toute déclaration d’amour, comme d’ailleurs toute déclaration, n’est qu’un projet métaphysique, certes ambitieux, mais inexécutable. L’amoureux est comme le politicien, sa rhétorique sera tôt au tard mise à l’épreuve.

§ 3

Il y a une différence entre aimer quelqu’un et aimer l’amour-propre de ce quelqu’un. Dans le premier cas, l’amour est superficiel mais durable, dans le second cas, l’amour est profond mais inéluctablement destructeur.

§ 4

Une relation amoureuse parfaite n’existe pas, parce qu’à la base il y a cette problématique insoluble : dans l’amour demeure t-on deux, ou devient-on un ? Dans la première hypothèse, l’amour est fade mais réaliste. Dans la seconde, il est totalitaire mais romantique.

§ 5

La société est appelée à s’intéresser à l’amour, car c’est le leitmotiv même de sa propre régénération. Cependant une société qui veut à tout prix contrôler l’amour et les amoureux en cherchant à moraliser l’acte amoureux, et par la même, la pensée amoureuse, est une société frappée par «le syndrome de Peter Pan». C’est une société qui a peur d’évoluer.

§ 6

Peut-on avoir un coup de foudre pour une femme voilée de la tête au pied ? Comment ? En aimant son regard ? Peut-être, mais est-ce vraiment son regard, ou celui de la société ?

§ 7

L’amour commence par un crime : étouffer son amour-propre. Mais souvent dans les crimes, la victime échappe à son bourreau. Parfois elle en garde des séquelles impérissables et parfois, elle prend sa revanche en tuant de ses propres mains son bourreau d’antan.

§ 8

Il y a l’amour aveugle, mais le pire de tous, c’est l’amour muet.