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Une aventure de Max Muldrit - 2 - La prison par Mueller Alex

Une aventure de Max Muldrit - 2 - La prison

 La prison

 

Presque inq mois avait passé depuis les événements de Millau. Le temps faisant son œuvre, j’avais complètement oublier l’affaire.

Un courrier recommandé provenant du tribunal de Millau me rappela les événements du passé.

Il m’informait entre autre, que mon agresseur avait été identifié en la personne d’une Nadine Fehlder, 34 ans, célibataire avec un enfant et placée en détention préventive pour vols simples, vols à la tire, coups et blessures. La prévenue avait été déclarée sans parents, sans domicile fixe et sans profession. Une liste des délits y était jointe. Elle comportait 6 vols dont un avait été suivi d’une bagarre avec blessures de la personne agressée. C’était une dame de 72 ans.

C’est sans doute l’agression avec bagarre et le sans domicile fixe qui avaient provoqué l’incarcération préventive.

Le courrier ajoutait que l’enquête était actuellement en voie d’être bouclé mais que si je le souhaitais, je pouvais, dans un délai de 10 jours dès réception de la présente, apporter encore des compléments d’enquête à Monsieur le juge d’instruction Pierre-André Mayen. Un numéro de téléphone était mentionné.

Je téléphonai à ce numéro. À la troisième sonnerie, une voix me répondit.

-  Mayen !

-  Monsieur le Juge d’Instruction. Demandai-je en confirmation.

-  Oui, parfaitement répondit la voix.

Après les présentations d’usage, je lui expliquai combien cette affaire m’avait affecté pour finalement lui demander :

-  Mais qu’a-t-elle fait de mes sous ?

-  Mais je n’en sais rien, me répondit-il, un peu agacé par une question aussi dénuée d’objectivité, il faudrait le lui demander, à elle.

-  Justement, pourrai-je lui faire cette demande et où est-elle ?

-  Elle est à la Maison d’Arrêt de Saint Quentin Fallavier en l’Isère mais il ne faut pas de contacts entre prévenu et plaignant avant le procès, ajouta-t-il.

Après une assez longue discussion dont je serais, aujourd’hui, bien incapable, de retracer toutes les allégations, les arguments que j’ai lancés pour finalement obtenir, que ce juge d’instruction m’accorde un droit exceptionnel de visite.

On finit par convenir que je pourrais me rendre à la Maison d’Arrêt de Saint Quentin, après-demain. Il ferrait le nécessaire pour qu’on m’autorise. - à titre particulier et vu la faible gravité des faits qui lui étaient reprochés, - à la rencontrer.

Tout fier de mon succès et surtout empreint de ce sentiment de faire le bien du genre « J’étais en prison et tu es venu me voir », je me préparai fébrilement à ce court voyage. Neuchâtel St Quentin, il faut compter environ trois heures en voiture à l’aller, et la même chose au retour.

Le surlendemain, je partis donc tôt le matin. J’achetai 2 plaques de chocolat dans un kiosque ouvert dès six heures.

L’arrivée devant la Maison d’Arrêt devait se situer vers les 11h00. Me présentant à la responsable des visites, je vis que le Juge avant bien transmis ma demande.

Je fus introduit aussitôt dans une grande salle avec des tables et des chaises toutes en métal. Ce mobilier était de couleur bleu-sombre. L’endroit si fonctionnel, avait quelque chose d’austère. Seul dans cet espace, j’imaginais les jours de visite. Il devait y avoir beaucoup de monde où la mélancolie d’amoureux séparés, de fils ou de fille retrouvant ses parents, l’image d’un papa visité par sa fille, reflétaient le désespoir de gens, de détenus d’une société meurtrie.

Le lieu était vraiment triste !

On me dit de prendre place pendant qu’on allait chercher la prévenue Nadine Fehlder. Je profitai de demander s’il était autorisé de lui offrir du chocolat. Apres un « Faites voir autoritaire» et un « Ça ira », je me sentis soulagé.

Après quelques instant d’attente, la porte s’ouvrit. Une jeune femme vêtue d’une tenue en drap bleu avec deux rayures blanches pénétra dans la salle.

L’ambiance changea d’un coup. De bon enfant qu’elle était jusque là, elle passa directement à l’état explosif. Dès son entrée, elle me dévisagea d’un regard foudroyant. Pour elle j’étais une bête hideuse à abattre. Ça se sentait. C’était sans équivoque.

Heureusement que j’étais assis car mes jambes ne m’auraient pas porté. Mon cœur se mit à dérailler comme un dingue.

À la place de ses yeux, il y avait deux mitrailleuses prêtes à tirer.

La gardienne avait dû l’informé de la personne qui venait la voir. En m'apercevant, je ne sais pas ce qu’elle a ressenti, mais les deux mitrailleuses se sont mises instantanément à tirer.

Tout ce que j'avais inconsciemment préparé dans ma tête comme belles phrases apaisantes avait disparu. La situation me parut soudain complètement déplacé. Je ne savais plus quoi dire me rendant subitement compte de l'incongruité de ma présence ici, face à cette femme détenue, n'ayant plus son enfant et moi, là, le petit bourgeois bien pensant. C'était le comble de l'inhumanité. Un désarroi et la honte m’envahirent.

Mais sans attendre elle me commença :

-  Ça vous plait de venir voir les animaux en cage. Vous n'êtes que de ces sales bourgeois qui viennent voir ceux qui n'en peuvent plus pour qu'ils leur lèchent les bottes. Vous faites semblant d'avoir de la compassion mais vous n’êtes que des dégueulasses. Vous n’êtes que de la merde - Partez.

L'attaque fut si soudaine et si violente que je perdis toutes mes cartouches. Avec la mauvaise gestion des événements à Millau c'était évidemment le troisième échec qui se préparait. C'était d'autant plus certain que cette fois, elle avait raison.

Quand on a fait du commerce dans la vie, il arrive de temps à autre qu'on se trouve confronté au client fou de rage. Peut-être pas aussi violent qu’ici, mais c'était déjà plus dans mes cordes de me sortir de ce genre de situation en tout cas plus que de me trouver nez à nez avec un pistolet. Pendant un court instant, je ne répondis rien. Je la dévisageai. J'attendais.

Elle me regardait. Je pris la parole :

-  Madame, vous avez raison mais je n'avais pas l'intention de vous humilier ou vous faire un affront quelconque. Je vous prie de m'en excuser. Je voulais simplement savoir qui vous étiez et vous demandez si vous aviez des nouvelles de Marie.

-  Foutez-lui la paix à Marie, reprit-elle à peine moins agressive.

« Toi, la haut c'est le moment de trouver une idée et vite ». Je n'avais pas le temps d'attendre une réponse. Je repris mon souffle pour essayer de me donner une contenance à peine un peu décontractée. Je dis en cherchant à poser mes mots:

-  Bon alors je vous laisse. Ah !, j'avais pourtant amené deux plaques de chocolat pour vous, j’en ai plus l’utilité alors, je vous les laisse. Je les pose ici sur la table peut-être que vous les mangerez. Je pensais aussi vous amener Marie pour qu’elle puisse venir vous faire une visite et vous embrasser mais c’est foutu. De toute façon, je ne sais pas où elle est. Bon ! Alors au revoir !

Je me dirigeai vers la sortie des visiteurs, c’est-à-dire à l’opposée de la porte par laquelle elle était venue. Je tournais maintenant le dos à la pièce, aux tables métalliques et à cette furie de Fehlder.

Pendant que j’étais tourné, une autre personne a dû entrer car une voix douce et gentille, dit :

-  Elle est à l’orphelinat des Sœurs de St François à Nevers.

Me retournant pour voir qui était la nouvelle arrivée, je vis qu’il n’y avait personne d’autre. Nadine était-là, seule, les yeux pleins de lumière, me faisant face. Les mitrailleuses avaient été rangées. Elle me regardait avec un visage si serein qui, sans parler disait « Ah ! Tu es d’accord d’aller me la chercher, Marie, j’en ai tellement besoin.».

J’étais bouleversé.

Cette proposition de lui amener Marie, je ne sais pas d’où elle m’était venue. Je me souviens simplement qu’avant de la lancer, j’avais pensé qu’il n’y avait plus aucun risque de dire une chose pareille au vu de l’ambiance qui régnait. Je m’attendais plutôt à recevoir une nouvelle volée de bois vert et au stade où on en était, ça n’avait plus d’importance. Je me demande même, aujourd’hui, s’il n’y avait pas eu là, de la provocation (mal saine) pour bien lui montrer comme j’étais bon et comme elle était ingrate.

Maintenant à la voir si confiante, si pleine d’espoir, je n’osais plus reculer. Cette fois je devais assurer mon acte et pour me consoler, je me dis que Nevers n’était finalement qu’à 300 km.

Quand on est en prison, voir son gosse ce n’est pas aussi facile qu’on l’imagine. Toutefois la transformation de Nadine était si manifeste que même sa responsable n’en revenait pas. Elle me confia plus tard que la prévenue Fehlder était la pire peste qu’elle ait connue en 10 ans mais c’était aussi et sûrement, la plus attachante.

Voir Nadine Fehlder redevenir humaine eu un effet dans toute l’institution. Tout le monde mit un entrain fou à obtenir les autorisations nécessaires pour qu’elle puisse recevoir la visite de sa fille. Même la psy fit un rapport alarmant disant que si cette mère ne retrouvait pas son enfant, elle (la psy) n’était plus en mesure de garantir qu’une issue fatale n’arriverait pas.

Durant le téléphone du directeur avec le juge d’instruction Mayen, il m’a semblé voir des étincelles sortir du combiné tant à l’autre bout du fil il y avait des éclats de voix. Des chuintements plus forts que d’autres disaient « vous n’y pensée pas », « C’est hors de question », « C’est hors du cadre de la légale », «  jamais je n’aurait dû autoriser cette visit de ce….(il parlait de moi) » mais, Monsieur le Directeur restait clame et déterminé. La conversation se termina soudain avec un « Finalement faites comme vous pensez, Directeur ». Demain, j’allais pouvoir aller à Nevers chercher Marie. J’avais rendez-vous à 10h30 à l’orphelinat rue des Chauvelles au Nord du centre hospitalier de Nevers.

 

 

J’arrivai à Nevers un peu avant 9h00. Comme j’avais du temps, je me fis une halte sur l’Esplanade du Château, face au Palais Ducal.

Nevers ne m’était pas inconnu car mon bureau d’ingénieur avait, à l’époque, été associé à la construction de la halle du tennis de table quand l’équipe de Nevers était devenue championne de France. Une visite systématique de la ville ne s’imposait donc pas.

Sur l’Esplanade, il y avait un petit chantier où des ouvriers creusait une fosse. En m’approchant pour regarder ce qu’ils faisaient, je heurtai accidentellement de la tête une sorte de structure qui portait divers tableaux électriques. Après quelques minutes mes lunettes sont devenues toutes rouges. Du sang coulait de mon front, ce n’était pas quelques gouttes mais une véritable fontaine. Il y avait du sang partout. Les gens commençaient à s’arrêter en me voyant me débattre avec un mouchoir complètement imbibé de sang. J’avais dû, en me tapant, sectionner un petit vaisseau. Une dame s’approcha de moi et me dit qu’il y avait un dispensaire tout proche et qu’il valait mieux me faire soigner. Elle voulait bien m’y conduire. Après cinq bonnes minutes de marche et après avoir remercier ma bienfaitrice, j’entrais dans le dispensaire. Une réceptionniste m’accueillit et me dit d’attendre. Comme le sang ne s’arrêtait pas de couler et que le sol, heureusement en matière synthétique, avait déjà reçu plusieurs taches, je bénéficiai finalement d’être pris en urgence. Là, c’est une infirmière qui s’occupa de mon cas. En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, je me retrouvai avec un gros pansement carré sur le front. L’hémorragie s’était arrêtée. Gentiment, l’infirmière me demanda si j’étais venu pour visiter la ville. Je lui dis que non, que je n’étais venu que pour chercher une fillette et la conduire chez sa maman, une Nadine Fehlder, qui n’était malheureusement pas en mesure de venir la chercher. Elle parut étonnée. Elle réfléchit et me dit qu’elle avait connu à l’école d’infirmière de Lons-le-Saunier une Nadine Fehlder. C’était sûrement une coïncidence mais enfin ça s’était finalement mal passé pour cette Nadine parce qu’à l’examen final d’infirmière, alors que tout le monde la voyait réussir même brillamment, à la stupeur de tous, elle ne fut pas reçue. Six mois avait passé depuis les événements de Millau et bon an mal an, j’avais complètement oublier l’affaire lorsqu’un courrier recommandé provenant du tribunal de Millau me rappela l’histoire. Il me signifiait que mon agresseur avait été identifié et placé en détention préventive. Il s’agissait d’une Nadine Fehlder, 34 ans. Célibataire avec un enfant. La prévenue a été déclarée sans parents, sans domicile fixe et sans profession. Plusieurs délits lui sont reprochés. Une liste de 6 vols dont le mien, le plus élevé, était joint à cette déclaration.

Le courrier disait que l’enquête était actuellement en voie d’être bouclé mais que si je le souhaitais, je pouvais, dans un délai de 10 jours dès réception du présent courrier, apporter encore des compléments d’enquête à Monsieur le juge d’instruction Pierre-André Mayen. Un numéro de téléphone était indiqué.

Je téléphonai au numéro indiqué. À la troisième sonnerie, une voix me répondit.

-  Mayen !

-  Monsieur le Juge d’Instruction demandai-je en confirmation.

-  Oui, parfaitement répondit-il.

Après les présentations d’usage, lui expliquant combien cette affaire m’avait affecté, je lui demandai.

-  Mais qu’est qu’elle a fait de mes sous ?

-  Mais je n’en sais rien, me répondit-il, il faudrait lui demander à elle.

-  Justement, pourrai-je le lui demander et où est-elle ?

-  Elle est à la Maison d’Arrêt de Saint Quentin Fallavier en l’Isère mais il ne faut pas de contacts entre prévenu et plaignant, ajouta-t-il.

Après une assez longue discussion dont je serais, aujourd’hui incapable de retracer toutes les allégations, les arguments que j’ai lancés pour finalement obtenir, qu’il m’accorde un droit exceptionnel de visite. Je pourrais aller après-demain à Saint Quentin. Il ferrait le nécessaire pour qu’on m’autorise à titre particulier et vu la faible gravité des faits reprochés à la prévenue, à voir Mlle Nadine Fehlder.

Tout fier de mon succès et surtout empreint de ce sentiment de faire le bien du genre « J’étais en prison et vous êtes venu me voir », je me préparai fébrilement à ce court voyage d’environ trois heures en voiture.

Pour l’occasion, j’avais même acheté 2 plaques de chocolat.

Le surlendemain, j’arrivai donc devant la Maison d’Arrêt. Me présentant à la responsable des visites, je fus introduit dans une salle avec des tables et des chaises toutes en métal. Le mobilier était de couleur bleue. Je m’imagine les jours de visite, il devait y avoir un monde fou. Mélancolie d’amoureux séparés, de fils ou de filles retrouvant leurs parents. Mélancolie d’un papa visité par sa fille de 17 ans. Tristesse !

On me dit de prendre place pendant qu’on allait chercher la prévenue Nadine Fehlder. Je demandai s’il était autorisé de lui offrir du chocolat. Apres un « Faites voir autoritaire» et un « Ça ira », je me sentis bien dans ma peau rempli de ce sentiment du devoir bien fait.

La porte s’ouvrit soudain et une femme habillée d’une tenue en drap bleu avec deux rayures blanches entra. Elle me regardait comme si j’étais une bête curieuse. Heureusement que j’étais assis car mes jambes ne m’auraient plus porté. Mon cœur se mit à battre comme un "un dingue". À la place de ses yeux, il n’y avait pas des yeux mais deux mitrailleuses prêtes à tirer.

Tout ce que j'avais inconsciemment préparé dans ma tête avait disparu et la situation me parut complètement déplacé. Je ne savais plus quoi dire. Je me rendais subitement compte de l'incongruité de ma présence ici. Cette femme détenue, n'ayant plus son enfant et moi, là, le petit bourgeois bien pensant, c'était l’horreur de l'inhumanité. J'ai été envahit par une honte sans limite.

La gardienne l'avait informé de la personne qui venait la voir. En m'apercevant, je ne sais pas ce quelle a ressenti, mais les deux mitrailleuses se sont mis instantanément à tirer. Elle m'a dit :

-  Ça vous plait de venir voir les animaux en cage. Vous n'êtes que de ces sals bourgeois qui viennent voir ceux qui n'en peuvent plus pour qu'ils leur lèchent les bottes. Vous faites semblant d'avoir de la compassion mais vous n’êtes que des dégueulasses. Vous êtes vraiment tous de la merde du monde - Partez.

L'attaque a été si soudaine et si violente que j'avais perdu toutes mes cartouches. Avec la mauvaise gestion des événements à Millau c'était évident que le troisième échec était en train d'arrivé et s'était d'autant plus certain que cette fois, elle avait raison.

Quand on a fait du commerce toute sa vie, il arrive de temps à autre qu'on se trouve confronté à un événement fâcheux comme celui-ci. Peut-être pas aussi si violant, mais s'était déjà plus dans mes cordes de me sortir de ce genre de situation que lorsque je me suis trouvé nez à nez avec le pistolet. Pendant un court instant, je ne répondis rien. Je la regardai. J'attendais.

Elle me regardait. Je pris la parole :

-  Madame, vous avez raison mais je n'avais pas l'intention de vous humilier ou vous faire un affront quelconque. Je vous prie de m'en excuser. Je voulais simplement savoir qui vous étiez et vous demandez si vous aviez des nouvelles de Marie.

-  Foutez-lui la paix à Marie, reprit-elle à peine moins agressive.

« Toi, la haut c'est le moment de trouver une idée et vite ». Je n'avais pas le temps d'attendre une réponse. Je repris mon souffle pour essayer de me donner une contenance à peine un peu décontracté et je dis en cherchant à poser mes mots:

-  Bon alors je vous laisse. Ah !, j'avais amené deux plaques de chocolat pour vous, j’en ai plus l’utilité maintenant, je vous les pose ici sur la table peut-être que vous les mangerez. Je pensais aussi vous amener Marie pour qu’elle puisse venir vous embrasser mais c’est foutu de toute façon, je ne sais pas où elle est. Bon, alors au revoir !

Je me dirigeai lentement vers la sortie à l’opposée de la porte par laquelle la prisonnière était venue. Je tournais maintenant le dos à la pièce aux tables métalliques. Une autre personne venait sûrement d’entrer car une voix douce dit :

-  Elle est à l’orphelinat des Sœurs de St François à Nevers.

Ne retournant pour voir la nouvelle arrivée, Nadine était-là, seule, les yeux pleins de lumière. Me faisant face, mitrailleuses avaient été rangées. Elle était là debout avec un visage si serein qui disait « va me la chercher, Marie ».

Cette proposition de lui amener Marie, je ne sais pas d’où elle m’était venue. Je me souviens juste qu’avant de la lancer, j’avais pensé qu’il n’y avait plus aucun risque de dire une chose pareille au vu de l’ambiance qui régnait. Je m’attendais plutôt à une nouvelle volée de bois vert qui, au stade où on en était, n’avait plus d’importance. Je me demande même, s’il n’y eut là de la provocation (mal saine) pour bien lui montrer comme j’étais bon et comme elle était ingrate. Un bien vilain jeu que j’avais joué là !

À la voir si confiante, si pleine d’espoir, je ne devais pas reculer, je ne pouvais plus reculer. Cette fois je devais assurer mon acte et finalement pour me consoler : « Nevers, ce n’est qu’à 300 km après tout. »

Quand on est en prison, voir son gosse ce n’est pas aussi facile qu’on puisse l’imaginer. Toutefois la transformation de Nadine était si manifeste que même sa responsable n’en revenait pas. Elle me confira plus tard que la prévenue Fehlder était la pire peste qu’elle ait connue en 10 ans mais c’était aussi sûrement, la plus attachante.

Voir Nadine Fehlder redevenir humaine eu un effet dans toute l’institution. Tout le monde mit un entrain fou pour arriver à obtenir les autorisations nécessaires pour qu’elle puisse avoir la visite de sa fille. La psy fit un rapport alarmant disant que si cette mère ne retrouvait pas son enfant, elle (la psy) n’était plus en mesure de garantir qu’une issue fatale n’arriverait pas.

Quant au directeur, lors qu’il téléphona au juge d’instruction Mayen, il me sembla voir, pendant la conversation, des étincelles sortir du combiné, où des chuintements plus forts que les autre disaient « vous n’y pensée pas », « C’est hors du cadre de la Loi », «  jamais je n’aurait dû autoriser cette visite » mais, Monsieur le Directeur restait clame et déterminé. La conversation se termina avec un « Finalement faites comme vous pensez, Directeur ». Demain, j’allais pouvoir aller à Nevers chercher Marie. J’avais rendez-vous à 10h30 à l’orphelinat rue des Chauvelles au Nord du centre hospitalier.

J’arrivai à Nevers un peu avant 9h00. Comme j’avais du temps, je me fis une halte sur l’Esplanade du Château, face au Palais Ducal.

Nevers ne m’était pas inconnu car mon bureau d’ingénieur avait, à l’époque, été associé à la construction de la halle du tennis de table quand l’équipe de Nevers était devenue championne de France. Une visite systématique de la ville ne s’imposait donc pas.

Sur l’Esplanade, il y avait un petit chantier où des ouvriers creusait une fosse. En m’approchant pour regarder ce qu’ils faisaient, je heurtai accidentellement de la tête une sorte de structure qui portait divers tableaux électriques. Après quelques minutes mes lunettes sont devenues toutes rouges. Du sang coulait de mon front, ce n’était pas quelques gouttes mais une véritable fontaine. Il y avait du sang partout. Les gens commençaient à s’arrêter en me voyant me débattre avec un mouchoir complètement imbibé de sang. J’avais dû, en me tapant, sectionner un petit vaisseau. Une dame s’approcha de moi et me dit qu’il y avait un dispensaire tout proche et qu’il valait mieux me faire soigner. Elle voulait bien m’y conduire. Après cinq bonnes minutes de marche et après avoir remercier ma bienfaitrice, j’entrais dans le dispensaire. Une réceptionniste m’accueillit et me dit d’attendre. Comme le sang ne s’arrêtait pas de couler et que le sol, heureusement en matière synthétique, avait déjà reçu plusieurs taches, je bénéficiai finalement d’être pris en urgence. Là, c’est une infirmière qui s’occupa de mon cas. En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, je me retrouvai avec un gros pansement carré sur le front. L’hémorragie s’était arrêtée. Gentiment, l’infirmière me demanda si j’étais venu pour visiter la ville. Je lui dis que non, que je n’étais venu que pour chercher une fillette et la conduire chez sa maman, une Nadine Fehlder, qui n’était malheureusement pas en mesure de venir la chercher. Elle parut étonnée. Elle réfléchit et me dit qu’elle avait connu à l’école d’infirmière de Lons-le-Saunier une Nadine Fehlder. C’était sûrement une coïncidence mais enfin ça s’était finalement mal passé pour cette Nadine parce qu’à l’examen final d’infirmière, alors que tout le monde la voyait réussir même brillamment, à la stupeur de tous, elle ne fut pas reçue.

 

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